Catégorie : Prix des lectrices

  • Du domaine des Murmures

    Du domaine des Murmures

    De Carole Martinez

    Une tragédie, avec toute la désespérance de ces histoires vouées à un destin fatal.

    L’histoire en quelques mots :

    En 1187, Esclarmonde refuse le mariage arrangé voulu par son  père. Elle tourne le dos aux traditions de l’époque, aux convenances de son rang et le jour de ses noces dit non à Lothaire de Montfaucon. Elle ne veut pas être sous les ordres d’un seigneur, d’un maître. Elle demande à vivre une vie de recluse et s’enterre vive dans une cellule de 4 m2 avec une fenestrelle pourvue de barreaux, attenante  à la chapelle du château. Le matin juste avant son emmurement, un homme la viole dans la forêt. Esclarmonde se tait et commence sa vie de recluse.

    Quelques mois passent et l’enfermée donne inexplicablement naissance à un garçon. Si elle sait que cette conception n’a rien d’immaculé, son entourage, lui, crie au miracle : « Je n’avais pas menti, je m’étais contentée de taire une vérité que personne n’avait envie d’entendre, et mon silence m’avait offert un espace blanc à brader, un vide dont chacun s’était emparé avec délice. » Le monde extérieur la considère comme une sainte. Elle devine les âmes et reçoit les confidences des pèlerins qui viennent à elle ou lui laissent des messages grâce au « réseau des emmurées ».
    « Je n’avais jamais tant reçu, tant parlé. » Depuis sa petite fenêtre aménagée dans ce qui ressemble à un tombeau, la jeune fille de 15 ans devient celle par qui le bien arrive, celle qui offre la rémission des péchés et auprès de qui la communauté se purifie.

    Cet enfermement est pour elle une évasion. À 15 ans, elle dit non à son père et se soustrait au joug de la condition de femme du XIIe siècle.
    Ce qu’elle qualifie de « mort » est pour elle  un espace de vie : elle force l’existence à lui offrir une place dans un monde gouverné par les hommes et la religion.

    Seulement ce qui semble un temps une forme d’évasion va se révéler insupportable, et le mot tombeau, enterrée vivante, prendra alors toute la dimension de son horreur. Le choix de ses 15 ans lui deviendra insoutenable. « […] un calvaire dont cette pauvre idiote n’avait jamais rêvé », dit-elle en parlant d’elle-même. Elzéar, son enfant, la quitte car il doit vivre une vie normale et bientôt il ne pourra plus passer par la fenestrelle. Puis un clerc se présente au château et lui demande de faire vœu de silence éternel. Son père a tout avoué sur la naissance de son petit-fils avant de mourir. L’église veut la condamner, veut encore plus, elle veut coudre la bouche pour s’assurer le secret de la naissance de l’enfant.

    « Comment pouvait-on me mutiler ainsi ? J’avais choisi de me clôturer, non de me taire. Cette fois la recluse volontaire se changeait bel et bien en prisonnière et je n’étais plus seulement la captive de la jeune fille de quinze ans qui, n’imaginant son bonheur qu’en Dieu, avait fait ériger cette chapelle, de cette naïve damoiselle des Murmures persuadée de gagner la béatitude et la liberté en s’emmurant vivante, d’une innocente qui ne savait encore rien du monde et ignorait à quel point un être peut changer. »

    Il y aura bien une femme, magnifique, pleine de vie, une véritable alliée qui lui proposera de l’aider. Bérangère, lui dira que rien n’est encore impossible, qu’elle peut sortir de son tombeau, qu’un mur est destructible. Comme on l’aime cette Bérangère, on a envie de l’aider, on a envie de lui trouver des marteaux , des outils efficaces pour enfin détruire cette tombe et libérer la recluse qui ne supporte plus sa condition et se rend enfin compte de l’abomination de son choix. Mais il y a la parole donnée. Elle lui propose alors d’être son émissaire et d’aller voir le pape à Rome pour qu’il la libère de son vœu. Car lui seul peut rouvrir dignement son sépulcre. Mais c’est sans compter sur les villageois rassurés par la présence d’une sainte à proximité, sur ces pèlerins qui ont besoin de se libérer de leurs péchés, Esclarmonde est leur garantie pour le paradis.
    « Que deviendraient-ils si la recluse revenait sur sa parole ? »

    J’ignorais qu’il arrivait que le menu peuple, aveuglé par la terreur, commît des meurtres pour qu’un saint ne quittât pas son pays.

    esclarmondeOrigine et étymologie de ESCLARMONDE:

    Esclarmonde est un prénom féminin issu de l’occitan esclarmonda, c’est-a-dire « éclaire le monde ». Ce prénom fut très répandu jusqu’à la fin du Moyen Âge dans toutes les régions d’Europe grâce à la chanson de geste Huon de Bordeaux dans laquelle le héros, protégé par le nain Obéron, réussit à conquérir Esclarmonde. Il est aujourd’hui assez rare.
    Esclarmonde célèbres : Esclarmonde de Foix, et plusieurs autres Parfaites du catharisme.

    Un conte médiéval, un souffle épique

    Mon avis de lectrice

    plume-et-encrier

    Une belle écriture, un beau souffle, le livre se lit facilement et nous emporte rapidement à cette époque lointaine du Moyen âge. Il nous donne une vision de ce moment de l’histoire, juste (bien documenté) et sans grande envie d’y retourner. Le sujet est intéressant, la condition des femmes de cette époque, la place imposante de la religion. Si l’auteure ne s’était pas lancé dans la surenchère aux souffrances elle aurait pu ravir totalement mes heures de lecture.

    C ‘est une tragédie, avec toute la désespérance de ces histoires vouées à un destin fatal. À travers le choix de l’emmurement, Esclarmonde va vivre une vie de recluse. Prisonnière à vie mais sans les régulières sorties et déplacements accordés à des prisonniers entre guillemets normaux. Un choix extrême, insupportable pour le commun des mortels. À travers cet état d’enfermement volontaire il y avait déjà beaucoup à dire. Pourquoi surenchérir avec le supplice de l’enfant, le viol, le vœu de silence. Vous me direz cela aurait fait un autre livre, et ces choix apportent des questions et une évolution au personnage. Cela lui permet de se rendre compte de l’horreur de son choix. C’est vrai, mais tout ce vocabulaire autour de la souffrance, de la douleur, de l’horreur, éveille chez moi une sorte de rejet. C’est un univers beaucoup trop sombre.

    bisnounours

    Notre époque aime particulièrement les univers sombres et torturés que ce soit au cinéma, à la télévision ou dans les livres. Je recherche autre chose dans les pages d’un livre. Je ne dis pas non plus que je ne désire lire que des livres qui se passeraient au pays des Bisnounours, un pays féerique, une histoire sans danger ne sont fidèles à aucun monde … cependant …
    Ce genre de lecture ne m’apporte rien, ne m’ouvre aucune fenêtre, ne répond à aucune de mes questions, ne me fait ni rêver, ni voyager. Mon avis ne concerne bien sûr que moi, ce livre a eu de nombreux prix, il ne sera pas en danger avec mes mots. Je sais de par mes efforts pour trouver quelque chose à lire, que mes goûts ne sont pas communs, ce n’est ni orgueil, ni sentiment de supériorité de ma part, c’est juste un constat.

    Dans la lecture je cherche l’évasion, je cherche à m’échapper du goût pour le morbide de notre civilisation, je cherche l’ouverture, des aspirations nouvelles, des notes d’espoir.

    Ceci est mon avis de lectrice, à un âge de la vie plus avancé que celui d’Esclarmonde et des collégiens qui l’ont beaucoup apprécié. Peut-être qu’à 15 ans j’y aurais trouvé des réponses, j’aurais vu le Moyen Âge sous un autre regard que celui des historiens classiques. À travers une histoire tout est plus clair. Tout semble plus vrai. J’aurais compris le danger des religions, le danger des choix extrêmes à un âge où on est en perpétuel changement et sous influence.

    Ceci pour dire que c’est un bon livre, bien écrit, sensible, extrêmement dramatique. Et qu’il porte sur des questions et des réflexions intéressantes et profondes. Mais aujourd’hui je cherche autre chose dans la lecture et après des journées remplies de famille et de travail, cernée par des actualités toutes plus sombres les unes que les autres, je cherche des livres porteurs de lumière, même si dans leur contenu il peut y avoir des passages difficiles. Il faut que le fond porte de la lumière.


    Échange sur le livre avec Sido

    Sido — Un livre inoubliable…
    Marie — C’est vrai, difficile d’oublier un tel destin. Carole Martinez est une raconteuse d’histoire et nous emporte très vite aux cotés d’Esclarmonde. Cependant c’est un univers très sombre pour lequel je ne développe pas une grande affinité en ce moment. Même si en effet c’est une incroyable histoire, très bien écrite, j’ai envie de lire autre chose. Il y a des jours comme ci et d’autres comme ça … j’ai envie de sourire avant de m’endormir.
    Sido — Je comprends, c’est très oppressant. Je me souviens l’avoir lu d’une traite, ainsi j’ai évité à l’angoisse de trop s’immiscer…
    Marie — C’est peut-être une bonne façon de la lire. La lecture en soirée, (ce rendez-vous quotidien du soir), dans cet univers sombre et pesant, après une journée parfois difficile m’a été à certains moments indigeste. C’est une  histoire qui ne laisse pas indifférent, l’extrémisme de la religion, le peu de choix des femmes, les guerres et les violences… tout un pan de notre civilisation. Qui n’est d’ailleurs pas encore totalement révolu, même s’il se vit autrement. Ce qui m’a parfois gêné c’est la surenchère aux violences, à la noirceur, certains passages auraient pu être évités ou traités autrement. Mais heureusement on a le droit de sauter des pages, le droit de ne pas finir un livre … (*Daniel Pennac).
    Sido — Je suis entièrement d’accord avec vous. C’est un peu le travers du style d’aujourd’hui, beaucoup de livres sont pressentis pour devenir des scénarios de cinéma et doivent répondre à certains critères. Cette histoire c’est le symbole de « l’enfermement » de la femme, dans un sens propre et figuré, en tant que femme on vit dans une tour, murée ou non, psychologique, conscient ou inconscient. Beaucoup de femmes doivent se battre au quotidien pour passer outre des murs visibles ou invisibles…souvent impalpables, mais réels. C’est le livre de la dignité et du Courage, de la douleur physique et morale anesthésiée, soulagée par la croyance en quelque chose de plus grand que soi. Mais loin de moi l’idée d’une supériorité quelconque de la femme. Et Pennac a tout à fait raison ! C’est un homme que je respecte profondément. Il y a un livre que j’ai trouvé insoutenable ainsi, c’est Les Bienveillantes de J.Littell. Je ne suis pas allée au-delà des 20 ou 30 premières pages. Intéressant de savoir la limite entre ce qui est descriptible ou pas. Vaste débat.

    Réflexion autour de l’univers du livre

    « Du Domaine des Murmures » de Carole Martinez, professeur de Français a eu le prix des Collégiens. Pour comprendre l’engouement des jeunes pour le livre, j’ai lu des critiques et écouté divers vidéos avec l’auteure. J’ai entendu dire qu’au départ il était passé inaperçu (c’est assez facile dans le flot des nouveautés quotidiennes qui s’amoncellent sur les tables des libraires) et que grâce aux avis de libraires enthousiastes il avait eu droit à une nouvelle couverture flambante rouge et à une bande concernant ses nombreux prix littéraires. Donc avant le prix des Collégiens il a eu la faveur des libraires, des adultes. Deuxième couverture, deuxième édition, succès. Cette anecdote m’interroge sur le pourquoi et le comment des succès de librairies, des mises en avant de certains livres. Cette interrogation n’a pas un rapport particulier à cette lecture, c’est une question que je me pose devant les livres mis en avant sur les tables des librairies.

    Sommes-nous totalement libres de nos choix de lecture ?


    + (cette réflexion n’a pas de rapport direct avec le livre ci-dessus qui est écrit par une auteure Française, c’est un questionnement personnel)

    Le choix des Éditeurs

    ? […] C’est ainsi, nos éditeurs ont choisi de prendre ailleurs ce qu’ils ont pourtant sous la main ! Ici des milliers d’auteurs sont ignorés. Disons le tout haut, un auteur sans relation ne peut pas être pris dans une grande maison d’édition. Quant au mythe du manuscrit arrivé par la poste et publié chez un gros éditeur, cela relève du conte de fées comme de gagner à l’Euro millions.
    Bien entendu, on ne fera pas un esclandre à propos de Philippe Picquier, un éditeur qui a choisi de faire découvrir l’Asie au public français. Mais pour les autres, il y a de quoi être irrité. Voyez-vous, en France on traduit tout, et ailleurs, notamment chez les Anglo-Saxons, quasiment rien. À l’exception de l’Italie qui aime bien les auteurs français et à qui nous rendons mal la pareille, la littérature française est devenue marginale dans le monde. D’une prétendue supériorité nous sommes à présent tombés dans un autre postulatum, nous voilà à renier notre importance révolue et pire encore, notre futur. Nos propres éditeurs émettent une sentence dédaigneuse contre les auteurs français. Tous occupés à leur mercantilisme, ils rejettent leurs compatriotes en méprisant leurs œuvres, ils passent ainsi à côté d’une chose essentielle, la préservation de la littérature française.

    Article du BibliObS

    En France les éditeurs se passionnent pour la vie de nos politiques. Il suffit de pénétrer dans la plupart des librairies pour le voir.
    Exemple : Le  livre de Cécilia Attias ?
    Est-elle passée par un comité de lecture comme tout auteur édité dans une grande maison d’édition ?
    En tout cas la télévision ne manque pas de lui faire un maximum de publicité. Il paraît qu’elle arrive au top des ventes. Soit sa plume est remarquable, soit notre société est assoiffée des potins de nos dirigeants. Je n’ai pas la réponse … juste une question :
    Qu’est-ce qu’être auteur aujourd’hui en France ?

  • Lira bien qui lira le dernier

    Lira bien qui lira le dernier

    Hubert Nyssen

    lira-bien-qui-liraS’adressant à une lectrice imaginaire, Hubert Nyssen, fort de sa double expérience d’écrivain et d’éditeur, passe au tamis les craintes, les espérances, les prévisions et les prophéties qu’inspire la supposée crise du livre.

    Déjà je peux commencer par dire que j’ai lu tout le livre, ( un exploit,  par rapport à mes deux précédentes lectures concernant le prix des lectrices). Cette  façon qu’à l’auteur de s’adresser à une lectrice imaginaire apporte tout de suite une intimité qu’on se plaît à retrouver chaque jour. On vit une conversation intimiste, profonde, parfois drôle sur un sujet vaste et intéressant (le milieu du livre et de l’édition). La parole d’Hubert Nyssen si concerné et impliqué  par la vie du livre  nous emporte dans sa passion jusqu’à la dernière phrase . Je me suis souvent imaginée près d’un feu,  c’est une lecture que j’ai faite cet hiver, dans un fauteuil confortable et  face à un homme ( un vieil ancêtre lointain ) avec qui j’avais rendez-vous chaque soir. Au fil des heures passées à l’écouter, il me révélait une partie de ce trésor familial si bien caché depuis des millénaires. Les mots partagés m’ont permis de découvrir ces couloirs parfois interdits de notre vieille maison d’édition si fascinante…

    Ce qui semble être central dans cette réflexion :
    Hubert NyssenLa littérature (et par-delà, la lecture) ne se survivra que si elle est exigence, travail et désir. Exigence sur la qualité des textes publiés, sur la capacité des auteurs et des critiques à lire (à l’exemple de Max-Pol Fouchet qui disait lire trois fois chaque livre  : une fois pour en prendre connaissance, une fois pour l’analyser, et une fois pour le confronter aux commentaires qu’il s’apprêtait à faire) ; exigence sur la langue. L’avenir de la lecture est sans doute lié au sort que nous réserverons à la connaissance des langues et à la pratique du langage.

    Thierry Ermakoff

    Extraits :

    Mon vœu est pour souhaiter des écrivains indifférents aux modes, des éditeurs affichant dans leur raison sociale ce qu’ils sont, des éditeurs littéraires, et des libraires reconstituant des lieux de rencontre […]

    […] des bibliothèques aux façades illuminées et aux portes ouvertes jusque tard dans la nuit, où on pourrait consulter les livres sous des lampes aux abat-jour verts, poser des questions sans souffrir de paraître ignorant […]

    Un livre en appelant parfois un autre, j’ai lu dans la lancée « Petits bonheurs de l’édition » de Bruno Migdal et « Une histoire de la lecture » d’Alberto Manguel (je ne l’ai pas encore terminé, je le lis par vagues d’envies…).

    une_histoire_de_la_lectureJe suis convaincu que nous continuerons à lire aussi longtemps que nous persisterons à nommer le monde qui nous entoure.
    Alberto ManguelLa bibliothèque de Robinson

  • Le boulevard périphérique

    Le boulevard périphérique

    Je suis une sorte d’intellectuel nerveux, au cerveau sans cesse en érection, au désir vite allumé, pris constamment entre des contradictions insolubles dont je me dis parfois, quand je l’ose qu’elles font ma richesse.
    — Henry Bauchau

    Le boulevard périphérique

      Je n’ai pas terminé non plus « Le Boulevard Périphérique » d’Henry Bauchau, bien que je sois allée un peu plus loin dans ma lecture (page 170) qu’avec le livre de Julie Otsuka. Mais l’univers triste et sombre, parfois extrêmement pesant qui anime les pages m’a donné envie de fuir, j’ai fermé le livre. Je ne suis cependant pas certaine qu’à un autre moment de ma vie je n’éprouve pas le désir d’aller jusqu’au bout, je ne sais pas, peut-être…

    Aujourd’hui rien ne m’oblige à lire ces lignes, et c’est vrai qu’en ce moment je n’ai pas de goût pour ces mots qui emportent dans la tristesse, l’incompréhension et l’injustice de la vie. Il aurait fallu un petit trait de lumière, une petite pousse d’espoir au milieu de tous ces destins sombres, pour que je puisse continuer à tourner les pages. Je n’ai pas senti d’espérance, contrairement à ce que dit le résumé de l’éditeur.

    Entre le trouble du narrateur pour Stéphane qui sera développé d’une manière ou d’une autre tout le long du livre, la guerre, la maladie de la belle-fille, la confrontation régulière avec les démons de Shadow le SS, il n’y a de place que pour des questionnements et des doutes qui tournent les uns autour des autres jusqu’à donner le vertige. Et même si l’ensemble est bien écrit, cette attirance pour le trouble et l’obscur, pour les contradictions insolubles, finit par peser lourd…
    Je peux lire des livres dramatiques mais je n’arrive à aboutir ma lecture que s’ils sont porteurs d’espérance. Il faut qu’à un moment ou un autre, d’une manière ou d’une autre un éclat de lumière traverse quelques lignes, qu’on puisse sentir un peu de ce vent du large qui ouvre l’horizon. Disons que ce sont mes conditions, mes convictions, une envie de ne pas retrouver dans les livres ce goût de notre société pour le morbide et la déprime.

    Finalement ce n’est pas si simple de faire partie d’un prix et d’avoir une liste imposée de livres à lire. Cependant il faut aussi reconnaître qu’on y croise des personnes passionnantes et passionnées et qu’on découvre également des livres et des auteurs qu’on aurait peut-être jamais croisés ou alors bien plus tard. Même si je n’ai pas le même enthousiasme pour chaque livre, la découverte de chacun, ne serait-ce que pour quelques pages, m’ouvre de nouvelles fenêtres sur la vie.

    DélugeJe me suis souvenu récemment que j’avais déjà lu un livre de cet auteur et que je l’avais terminé avec difficulté. Il s’agit du « Déluge » : l’histoire d’un  peintre vieillissant, instable, fou et pyromane qui brûle et regarde se consumer ses propres dessins. Je n’arrive pas à entrer dans ce genre d’univers ou peut-être n’en ai-je tout simplement pas envie.

    Biographie de Henry Bauchau

    h-bauchauHenry Bauchau est l’auteur d’une œuvre aussi riche que tardive. Ce n’est qu’à l’âge de 45 ans qu’il publie son premier livre. C’est en effet au lendemain de la guerre, que ce psychanalyste Belge, né à Malines, est venu à l’écriture.

    Henry Bauchau, est psychanalyste, poète, dramaturge et romancier belge de langue française. Membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, il a vécu à Paris de 1975 à sa mort en 2012.

    Il commence par étudier le droit à la faculté de Louvain. Mobilisé en 1939, il effectue la campagne des 18 jours en mai 1940, s’engage en 1943 dans l’Armée secrète et combat avec le maquis des Ardennes. Après la guerre, en Belgique, il fonde une maison de distribution et d’édition. Mais le plus important c’est qu’à la suite d’une dépression, de 1947 à 1950, Henry Bauchau suit auprès de Blanche Reverchon (épouse du poète Pierre Jean Jouve et une des premières traductrices de Freud en France) une analyse qui va l’apaiser et le transformer. Vie d’avocat, de directeur d’une école de jeunes filles, de professeur d’histoire de l’art, de psychanalyste, puis enfin de poète avec Géologie, son premier livre édité.

    La carrière d’écrivain d’Henry Bauchau commence mais son public est très restreint. Il lui faudra attendre 1 990 et son livre Œdipe sur la route pour qu’un public plus large le découvre. Ariane Mnouchkine adapte sa pièce Gengis Khan. Aussi à l’aise dans le genre romanesque – La Déchirure, La Dogna, Le Régiment noir – que dans la poésie – L’Escalier bleu, La Pierre sans chagrin -, il est aussi l’auteur d’un Essai sur la vie de Mao. Il publie en 2007 Le Boulevard périphérique, prix du livre Inter 2008, puis L’enfant rieur (2 011) et Temps du rêve (2 012).

    Il meurt le 21 septembre 2012 à Paris, à l’âge de 99 ans. Son dernier ouvrage est sur Blanche Reverchon et Pierre-Jean Jouve, Pierre et Blanche.

    Si vous voulez en savoir plus sur cet auteur, vous pouvez regarder cette vidéo dans laquelle il parle de son oeuvre : http://www.sonuma.be/archive/henry-bauchau

  • Certaines n’avaient jamais vu la mer

    Certaines n’avaient jamais vu la mer

    de Julie Otsuka, traduit par Carine Chichereau, Phébus
    En ce qui concerne le Prix des lectrices, j’ai tout de même trouvé des moments pour lire quelques livres de la liste.

    L’extraordinaire histoire de l’émancipation des femmes japonaises, passant d’un statut féodal particulièrement contraignant à une vie épanouie de femme du XXe siècle »  été en grande partie le fait des journaux féministes du Japon dont le premier dut son existence à « une campagne menée vers 1920 afin d’obtenir pour les jeunes filles le droit de refuser un mari syplilitique.
    Cf. La presse féminine d’Evelyne Sullerot, collection Kiosque d’A.Colin.

     Qui n’aurait pas honte aujourd’hui de voir que les femmes ont dû se battre pour échapper à un sort aussi scandaleux ?

    Certaines n'avaient jamais vu la merJ’ai lu la moitié du livre de Julie Otsuka, « Certaines n’avaient jamais vu la mer ».
    Le « nous » impersonnel que l’auteure emploie pour parler de ces immigrantes japonaises qui débarquent aux Etats-Unis et le style qui ressemble à une longue et lancinante énumération ont eu raison de mon courage qui voulait aller jusqu’au point final. Je me suis arrêtée à la page 64, juste avant le chapitre « Naissances ».

    Je ne me permets pas de porter un jugement sur le destin terrible de ces femmes vendues et abandonnées, (destin Ô combien injuste et douloureux),  c’est la façon de traiter le sujet qui ne m’a pas convaincue. Faire parler un choeur de femmes était une idée lumineuse mais il manque à ce choeur un sentiment d’humanité. On est envahi par un flot incessant de paroles qui finit par lasser et rend invisible la plainte véritable de ces vies sacrifiées. Après quelques lignes les voix  se mélangent et s’annulent les unes les autres, la monotonie s’installe. Il aurait fallu une voix unique par-dessus ce choeur, une voix que l’on aurait suivi du début à la fin, une voix qui par moment aurait remplacé « le nombre » pour s’approcher du lecteur et lui murmurer sa solitude et sa grande détresse. Il manque à ce choeur son coryphée (celui qui conduisait le choeur dans les tragédies antiques). Choeur – Coryphée, l’un ne va pas sans l’autre, c’est l’alternance des deux qui donne toute la dimension aux tragédies. J’aurais aimé qu’une voix s’élève au-dessus des autres et nous guide dans cette énumération impersonnelle. Mais voilà, c’est un avis, juste mon avis et mon ressenti. Ce qui ne m’empêche pas d’avoir du respect pour l’auteur qui dénonce une atrocité de notre humanité.

    Biographie Julie Otsuka

    https://i0.wp.com/i39.servimg.com/u/f39/11/59/18/67/20022510.jpgJulie Otsuka est est une écrivain américaine d’origine japonaise née en 1962 en Californie. Elle vit à New York. Diplômée en art, elle abandonne une carrière de peintre pour l’écriture. Elle publie son premier roman en 2002, Quand l’empereur était un dieu largement inspiré de la vie de ses grands-parents ( l’ évocation des camps où 110.000 citoyens américains d’origine japonaise ont été internés aux Etats-Unis après l’attaque de Pearl Harbour ). Son deuxième roman, Certaines n’avaient jamais vu la mer a été considéré aux États-Unis, dès sa sortie, comme un chef-d’œuvre.

    Le livre – Au début du XIXe siècle, un bateau venu du Japon se dirige vers San Francisco. A son bord, des jeunes filles qui ont quitté leur pays pour rejoindre leur futur époux. Après une longue traversée, elles découvrent à la place des princes charmants dont elles rêvaient des paysans beaucoup moins séduisants que sur les photos qu’ils ont envoyées. Elles vont réaliser la manipulation dont elles ont été victimes mais trop tard car elles n’ont pas de billet de retour. Le rêve se transforme en cauchemar car les hommes rudes et brutaux les feront travailler sans relâche.

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  • Rencontre avec J.Kalman Stefansson

    Rencontre avec J.Kalman Stefansson

    Il s’est remis à neiger quand Ólafía les rejoint à grand-peine. Le ciel abrite une multitude de flocons. Voilà les larmes des anges, disent les Indiens au nord du Canada quand la neige tombe. Ici, il neige beaucoup et la tristesse du ciel est belle, elle est une couverture qui protège la terre du gel et illumine l’interminable hiver, mais elle peut aussi être froide et presque impitoyable.

    La tristesse des anges Actuellement en pleine lecture de « La tristesse des anges », deuxième volume de la trilogie, j’ai eu envie de faire un peu plus connaissance avec l’auteur J.K Stefansson. Je prends mon temps dans cette lecture, tant j’adore m’abreuver aux mots de cet écrivain poète. Entre le premier livre qui a laissé une empreinte éternelle sur ma vie « Entre ciel et terre » et celui que je lis maintenant, je me dis que j’ai trouvé l’auteur que j’attendais depuis longtemps. Il existe de nombreux questionnaires dans les groupes de lecture qui posent invariablement cette question : quels sont vos auteurs préférés ? Bien souvent je me suis dit que j’aurais du mal à répondre à une telle question, car je n’ai pas particulièrement d’auteur favori. Il y en a qui ont ma préférence mais ce sont plutôt les poètes. Aujourd’hui c’est différent, je pourrais répondre à la question en disant que l’un de mes auteurs préférés, celui qui déclenche en moi d’étranges rêves pendant que je le lis, celui à qui je trouve une humanité éblouissante, celui qui me fait voyager au cœur de la vie et de l’homme, c’est J.K Stefansson. Tout cela pour vous dire la raison qui m’a donné envie de faire cet article — collecter des informations sur un écrivain qui m’enchante.

    Ecoutez : Nous autres par Zoé Varier le vendredi de 20h à 21h

    Islande 1ère partie : entre terre et littérature – Rencontre avec Jon Kalman Stefansson –
    Ecoutez sur France-inter – L’émission du vendredi 2 décembre 2011 –

    Le poète qui écrivait des romans

    Propos recueillis à Paris en mars 2011,  par Mikaël Demets

    jon-kalman-stefanssonOn sent dans votre écriture une grande souplesse, comme si vous vous laissiez surprendre par ce que vous écriviez. C’est le cas ?

    Cela fait clairement partie de mon style. Je commence toujours à travailler avec un plan assez précis, mais dès que je me mets à écrire, quelque chose de nouveau me vient, quelque chose d’imprévu, que je n’aurais jamais pu imaginer. C’est là que mon écriture rejoint la poésie : je laisse la porte ouverte à l’inattendu. J’écris avec mon cœur, avec mes sentiments. Or mes sentiments changent tous les jours, évoluent selon mon humeur, les événements extérieurs… Finalement, qu’est-ce que la création, sinon cette part d’incertitude et de spontanéité ? Je n’aime pas cet aspect de la fiction qui voudrait que tout soit anticipé, calculé. Le lecteur le sentira, et il ne sera jamais touché, jamais surpris.

    Quelle fut la principale difficulté lors de l’écriture de Entre ciel et terre ?

    Écrire un roman historique m’a posé beaucoup de problèmes. Ce genre est très classique, très traditionnel, et souvent, les écrivains qui s’y collent sont obsédés par les faits, par l’Histoire. Du coup, leur personnalité tend à disparaître derrière tout ça. Je ne voulais surtout pas que cela m’arrive. J’ai donc attendu avant de me lancer dans l’écriture de ce livre, le temps d’avoir plus d’expérience, et une technique qui me permettrait de surmonter ce problème. Je me suis entraîné. Au final, je suis content d’avoir écrit un roman, et non pas un roman historique.

    http://laccoudoir.files.wordpress.com/2011/04/islande-tom-manoury.jpg

    Entre ciel et terre a beaucoup de connexions avec Le Paradis perdu de John Milton : l’un des personnages est fasciné par ce livre, vous réutilisez beaucoup de citations de Milton, et vous lui empruntez même vos titres de chapitres. Comment expliquez-vous le rapport étroit qui lie votre ouvrage avec le sien ?

    C’est venu tout seul, je ne l’ai pas vraiment décidé. A l’époque de l’écriture, je n’aurais pas su répondre à votre question : je sentais seulement que ce lien existait. J’avais un sentiment très fort qui me liait au Paradis perdu quand je travaillais sur Entre ciel et terre. Avec le recul, je pense que tout réside dans la double lecture que propose Le Paradis perdu. C’est d’abord un grand poème épique sur l’origine du monde, Adam et Eve, les débuts de l’humanité. Là où tout commence. Mais en même temps, et surtout, c’est une histoire d’amour. Simple et universelle. J’aime le balancement entre ces deux dimensions du texte. De plus, en Islande, la traduction de Milton par Jón Porláksson est d’une beauté extraordinaire, assez éloignée du poème originel, mais magnifique au point que la parution de cette version islandaise a été extrêmement importante pour notre littérature. Mais derrière ces raisons concrètes, il reste quelque chose d’indéfinissable : quand un écrivain emprunte des mots à un autre écrivain, il ne sait pas toujours l’expliquer. En tant qu’auteur, tu as les mots dans le sang, et lorsque tu écris, tu ressors tout ce que tu as à l’intérieur. C’est ainsi que Milton a surgi.

    La mer a une très grande importance dans votre roman, on pourrait presque la considérer comme le personnage principal. Faut-il y voir le reflet de l’importance qu’a l’océan pour les Islandais ?

    entre ciel et terre 200x300 RENCONTRE AVEC JON KALMAN STEFANSSON / Le poète qui écrivait des romansÊtre islandais, c’est ne pas avoir de voisins. Or vos voisins ont toujours une influence sur vous : l’Histoire de France est par exemple étroitement liée à l’Allemagne. Une partie de votre caractère a été forgée par cette relation. Mais en Islande, le voisin, c’est l’océan. Jusqu’à une époque récente, les Islandais n’étaient qu’un peuple de marins et de fermiers qui devaient sans cesse affronter ce monstre, portés par leurs fragiles embarcations. Quand on passe sa vie à lutter contre une force aussi immense et aussi puissance, cela marque forcément le caractère. En Islande, on ne peut pas échapper à la mer. Elle a imprégné notre mentalité.

    Votre écriture paraît très animiste. La nature ressemble à un corps convulsé. On dirait que vous avez calqué le rythme de votre récit sur celui de la nature.

    La vie est partout. Son cœur bat dans le vent, dans la neige, dans la mer.. Il y a un an, l’éruption du volcan islandais Eyjafjallajokull a paralysé la planète entière, alors que ça n’était qu’une toute petite éruption, un détail à l’échelle de la nature. Cet événement nous a remis à notre place, rappelant combien notre conception du monde était aberrante. Aujourd’hui nous ne jurons que par le dieu Technologie, nous croyons en lui, nous avons confiance en lui. Mais il suffit d’un petit sursaut de la nature et tout se détraque. Nous devons faire évoluer notre façon de penser et remettre la nature au cœur de notre vie. La plus grosse erreur de l’humanité consiste à tracer une ligne entre l’homme et la nature.

    On a finalement l’impression que Entre ciel et terre est un texte sur les frontières, ou plutôt le dépassement des frontières. Entre poésie et fiction, entre humanité et nature et entre vie et mort.

    Tout à fait. Ce livre mélange tout. Je ne crois pas aux frontières, de manière symbolique comme de manière très concrète. Les frontières reflètent un mode de pensée limité, fermé, qui nous rend étroits d’esprit. C’est un schéma qui engendre la haine, alimente l’incompréhension et l’ignorance. Naïvement, j’écris des livres pour changer le monde. Or l’un des principaux problèmes de ce monde réside dans cette conception étriquée du territoire et de la séparation avec l’autre.

    Comme pour matérialiser cette porosité des frontières, votre récit est raconté par des personnages mystérieux, qui semblent coincés entre la vie et la mort.

    Tout à fait. C’est un groupe de personnages qui a vraisemblablement vécu dans les temps où l’histoire s’est déroulée. Ils sont coincés quelque part entre vie et mort et ne savent pas pourquoi. Alors ils racontent l’histoire de l’orphelin et de Bárdur, en espérant que cela les aide à aller ailleurs. A mourir, enfin. En définitive, le plus grand pouvoir des hommes réside dans la parole : raconter des histoires, et surtout raconter des histoires sur le passé. Si l’on ne se souvient pas des jours passés, on n’apprend jamais rien. Les mots sont la seule chose qui nous distingue des animaux. On peut tout faire avec eux, changer la vie, changer le monde. Mais en même temps, arrive toujours un moment où ils sont impuissants. Les mots possèdent toute la terreur et toute la beauté du monde à la fois. C’est sans doute pour ça que j’en ai fait mon métier.

     

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  • Suite française

    Suite française

    Irène Némirovsky

    J’ai écrit un premier article lorsque j’ai commencé la lecture de ce livre. Il parle de l’auteur et du moment de la création du livre. Vous pouvez le lire en suivant ce lien : Article sur Irène Némirovsky

    Le silence et l’abandon

    Suite française

    Irène Némirovsky ne se laissa pas tourner la tête par son entrée fracassante en littérature. Elle s’étonna même qu’on fit tant de cas de David Golder, qu’elle qualifiait sans fausse modestie de « petit roman ». Elle écrivit à une amie le 22 janvier 1930 : « Comment pouvez-vous supposer que je puisse oublier ainsi mes vieilles amies à cause d’un bouquin dont on parle pendant quinze jours et qui sera tout aussi vite oublié, comme tout s’oublie à Paris ? »

    J’ai terminé la lecture de Suite française d’Irène Némirovsky, ce qui me permet d’avoir une autre vision de la guerre, des français, des allemands, et surtout de l’humanité. Je peux dire que cette lecture m’a laissé un goût amer dans le cœur. Bien sûr,  les lectures qui tournent autour de ces sujets douloureux sont souvent bouleversantes, mais là c’était différent. Un tableau sombre du peuple français et de son manque d’esprit solidaire.

    Sauve qui peut,  moi d’abord, les autres s’il reste de la place, et si on peut en jeter quelques uns  au milieu de la tempête ce sera plus confortable…

    La manière dont  l’auteure parle du comportement des gens  fait bien souvent grincer les dents. Difficile d’avaler la lâcheté de certains, l’acceptation de l’humiliation, les dénonciations, la collaboration dès les premières années de la guerre. Chacun est abandonné à son sort et il faut se méfier des autres, les allemands sont parfois plus arrangeants que les collègues ou les voisins. On est en guerre contre les allemands mais aussi et d’une manière qui fait froid dans le dos contre tous les français qui veulent garder leur confort et leur sécurité. Certains  sont prêts à tout pour ne rien perdre de leurs privilèges, d’autres laissent leur plus vils instincts s’épanouir.  Camouflée au milieu d’une débâcle indescriptible, dans un chaos hétéroclite de piétons et de véhicules de toutes sortes gênant le déplacement des troupes, l’ombre de l’âme se déploie et s’agrandit.

    « Pour soulever un poids si lourd
    Sisyphe, il faudrait ton courage.
    Je ne manque pas de cœur à l’ouvrage
    Mais le but est long et le temps est court. »

    En juin, lorsque les troupes allemandes s’approchèrent de Paris, les populations d’Île-de-France s’enfuirent à leur tour. Des bagarres eurent lieu pour pouvoir prendre les trains (trains d’abord de voyageurs puis devant l’afflux, réquisition de trains de bestiaux). Des millions de personnes s’exilèrent.  Le gouvernement français  s’était enfui de Paris dès le 11 juin 1940 pour gagner Bordeaux.

    exode

    L’exode de 1940 en France est une fuite massive de la population française en mai-juin 1940 lorsque l’armée allemande envahit la majorité du territoire national pendant la bataille de France, après la percée de Sedan. Cet exode est un des mouvements de masse le plus important du XXe siècle en Europe.

    C’est ce livre que j’aurais dû lire l’année de première au lycée lorsqu’on étudie la guerre 39-45.

    La guerre est une vermine qui contamine toutes les rives, elle n’épargne personne. La force qui permet d’avancer et de tenir bon est bien sûr au cœur de nous-même, lorsqu’on fait ce qui doit être fait. C’est à dire sauver les hommes des tyrans, des despotes, des lâches, de la souffrance.  Il ne s’agit pas ici de gagner des batailles avec des armes lourdes, il s’agit de vaincre la plus dure d’entre elles, la plus éprouvante, la plus sournoise, celle contre soi-même, celle contre la peur, celle contre nos faiblesses…

    Irène Némirovsky est une grande auteure qui ne se plaint jamais, qui peint avec ses mots et une lucidité étonnante et courageuse ce qui se passe sous ses yeux, alors qu’elle court un grand danger. J’aurais aimé la connaître et parler avec elle de sa passion pour la littérature. Je vais certainement lire ses autres livres.
    « Il la revit dans sa mémoire. Elle n’était pas laide, non, elle n’était pas laide. Au fond, c’était touchant, cet amour… Il le devait au prestige de ses livres, de son esprit rayonnant à travers les pages imprimées. »
    Avant d’entamer un nouveau livre de la liste du prix des lectrices,  je pense que je vais faire une pause et lire une BD ou un livre plus joyeux, plus léger. Mes nuits commencent à être difficiles,  il me faut des pages poétiques et douces…

    Mémoire à transmettre pour ceux qui ont connu et connaissent encore aujourd’hui le drame de l’intolérance
    — Denise Epstein