Ô cheval au regard flamboyant ! Tu cours dans l’azur et les plaines nuageuses. L’écume des flots argente ta bouche, la sueur ruisselle à tes flancs polis. Tu écumes, tu frémis, au bord de la mer immense tu hennis, tu bondis, tu galopes et ta crinière danse avec le vent.
Et moi, fascinée par tant de puissance et de beauté j’accoure sur mes petites jambes d’enfant mais j’ai peine à suivre ta trace.
Soudain, ta course s’arrête, tu enfonces tes sabots dans le sol et tu frappes la terre en cadence. Mais comme ton cœur est noble et doux, ployant sur tes jarrets forts, tu te soumets humblement à l’homme vertical et à sa cravache. Essoufflée mais enivrée par ta présence j’avance timidement ma main pour caresser ton museau tout chaud. Dans mon cœur la colère bouillonne contre celui qui t’a piégé et contraint et je regarde impuissante tes dents ronger le mors. Mais lorsque je plonge dans tes yeux bruns et profonds ma colère s’apaise. Au fond de tes pupilles j’ai reconnu celui que je rejoins chaque nuit, celui qui m’emporte dans des chevauchées intrépides au milieu des plaines invisibles du grand empyrée.
Ô cheval, mon ami, qui m’emporte loin du monde ! LAISSE-MOI TE CONTER la grande histoire des « Cavales », laisse-moi te dire le récit fantastique de ces fières et indomptables filles du soleil, tes sœurs.
Sur mes cahiers d’écolière – Mon héros de toujours De ce petit texte d’enfance est né un récit magique autour des Cavales, une première ébauche qui a accompagné le livre d’un peintre, puis une autre histoire s’est construite avec les filles du soleil.
J’ai embarqué sur le navire-écriture et pris le large.
La traversée est rythmée par mes sautes d’humeur, des moments de désespoir alternent avec d’intenses exaltations, je suis emportée par la houle… J’écris, je relis, je rature, j’écris… je rame, je rame, je suis le cap de ma belle espérance. Que se passe t-il sur le continent, dans le monde, dans la vraie vie, je ne sais pas. Quand je lève la tête au-dessus de mes cahiers, de mes feuillets épars où de mon ordinateur, j’observe la course des nuages et la danse des mouettes et des goëlands, j’avale un café chaud presque brûlant et je laisse la mer me bercer quelques instants. Oh ! Une idée ! Une image ! Un personnage me susurre quelque chose et c’est reparti !
Écrire, écrire.
En ce moment, quoi d’autre ?
Presque rien.
OUI mais…j’ai terminé une première histoire, la suite démarre à grande vitesse, les personnages ne me lâchent plus… Et puis il y a cette nouvelle sur le cahier bleu, ce roman en cours…ce conte qui me fait de l’oeil… Page 52, 82…livre 1, page 114, livre 2… nouvelle illustrée terminée, page 340… Une histoire sans fin, des numéros de pages s’affichent, disparaissent, reviennent… J’ai mis la grande voile !
J’espère que le vent de l’inspiration me sera favorable jusqu’au bout et que ma modeste embarcation tiendra le coup fasse aux assauts de mes incertitudes. Mener tout ce monde à bon port telle est ma mission à ce jour.
Lettre de Virginia Woolf à Vita Sackwille-West, le 16 mars 1926.
Pour ce qui est du « mot juste », tu es tout à fait dans l’erreur. Le style est une chose très simple, tout est dans le rythme. Une fois qu’on l’a compris, on ne peut plus employer des mots de travers. Mais, d’un autre côté, me voici assise à ma table de travail depuis une bonne moitié de la matinée, pleine à craquer d’idées, de visions et de tout le reste, et je n’arrive pas à les débucher, simplement parce que le rythme adéquat me manque. Or c’est quelque chose de très profond la nature du rythme, et cela va beaucoup plus loin que les mots.
Passionnée de lecture depuis longtemps, j’ai amassé tant de livres qu’ils envahissent mon espace vital. Cela m’est devenu évident lors du récent déménagement, d’autant que nous réduisons notre espace de vie de 110 m² à 60m².
Une question s’est rapidement posée : comment ranger les livres sans qu’ils envahissent tout l’espace ? Puis vint le temps des cartons, des cartons de livres, nombreux et pesants. Enfin il fallut assumer le regard accusateur, malgré un petit sourire en coin, de ceux qui aident gentiment au déménagement : — Un autre carton de livres ? De revues ? — Euh, oui, mais celui-ci est moins chargé… Conclusion n° 1 de ces derniers jours, ceux qui aiment les livres sont des bourreaux pour leurs copains déménageurs.
D’où mes questionnements :
La place des livres dans ma vie, dans ma maison ? Bien entendu je ne parle pas ici de caravane, de yourte, de tipi ou autre. Malheureusement, apprécier les livres et les bibliothèques nécessite souvent de vastes espaces de vie, des demeures généreuses, de grands appartements, de l’espace et des installations adéquates, ce qui implique des ressources financières, surtout avec les loyers exorbitants d’aujourd’hui, particulièrement en milieu urbain.
Quelle est la place d’une maison dans ma vie ? Est-il possible d’aimer la lecture tout en étant nomade ? Comment concilier un mode de vie nomade ou de locataire, qui ressemble à une envie constante de mouvement comme la mienne, avec la passion pour la lecture, les livres, le papier, sans surcharger les amis déménageurs ? Sans devoir occuper un logement de 150 m² avec un loyer exorbitant. Conclusion n°2, pour posséder une belle bibliothèque, accessible et facile à organiser, il est nécessaire d’avoir de l’espace, ce qui est souvent synonyme de coût élevé.
Vivre à l’intérieur ou à l’extérieur ? Privilégier l’espace fermé ou l’espace ouvert ?
Je me questionne, bien que j’aie déjà choisi le petit logement. Modeste à l’intérieur, grandiose à l’extérieur ; à quelques pas de la mer, avec vue sur des champs où vivent quelques vaches, des faisans et des lapins en liberté, non loin de lagunes accueillant parfois un couple de cygnes, un héron et des aigrettes. J’écris depuis la terrasse où le soleil brille, en compagnie d’un ravissant rouge-gorge, d’un pinson et de quelques mésanges qui gazouillent gaiement leur avis sur la question. Habituellement encline à l’interrogation et à la réflexion approfondie avant toute décision, cette fois, sans hésitation, le jardin et la maisonnette ouverte sur le ciel et la nature ont eu ma faveur.
Que faire de ma passion pour les livres ? Je suis consciente que nos déménagements ne sont pas terminés. De plus, j’ai l’intention de réaliser un jour mon projet de longue date, partir quelques mois avec un sac à dos, un crayon et de quoi lire. Ayant récemment décidé de publier mes textes en ligne au format ebook, je vais acquérir une liseuse. Cela serait plus professionnel de visualiser mes livres comme le font les lecteurs. C’est décidé, je franchis le pas. Ce n’est pas un grand saut, je me prépare mentalement depuis un moment (j’ai pesté contre le poids de certains livres cette année, leur rigidité, surtout le soir après une journée épuisante).
Je conserve des livres qui me sont chers depuis longtemps, tels que les recueils de poésie, les contes illustrés, les albums photos et les livres d’art. Pour les romans classiques et les nouveautés, je préfère les lire sur une liseuse. En préparation pour le déménagement, j’ai effectué un grand tri, y compris un nettoyage de la poussière, et j’ai donné ou vendu certains ouvrages que je pensais relire un jour, un jour peut-être…
Je vais attendre encore un peu avant d’investir dans une liseuse, car les frais de déménagement n’ont pas diminué au fil des ans. Cependant, dès que j’aurai fait l’expérience, je partagerai mon avis. Bon, à bientôt, un rayon de soleil m’invite à sortir…
PS : Il ne faut pas oublier les bibliothèques et les médiathèques, des endroits merveilleux pour ceux qui aiment lire, sans pour autant posséder immédiatement les livres qu’ils consultent.
Le déménagement touche à sa fin, il ne reste que quelques cartons à emporter avant de dire au revoir au continent. Je suis émue et bouleversée devant le silence et la splendeur de ce lieu qui me captive. Mon seul désir est de vivre pleinement, d’exister, d’être… En emballant mes livres, j’ai redécouvert « Les rêveries du promeneur solitaire » de J.J Rousseau. Relire ce texte s’accorde bien avec ma vie naissante d’insulaire. Je m’accorde encore quelques jours avant de reprendre mes travaux laissés en suspens.
[…] Le flux et le reflux de cette eau, son bruit continu mais renflé par intervalles frappant sans relâche mon oreille et mes yeux, suppléaient aux mouvements internes que la rêverie éteignait en moi et suffisaient pour me faire sentir avec plaisir mon existence sans prendre la peine de penser. […]
J’écris d’un pays qui n’existe pas. […] Quand j’écris, je ne suis pas ici. Je ne suis pas non plus ailleurs. Je suis dans ce que j’écris, ou plutôt je suis ce que j’écris.
Ils vivent dans deux mondes, celui que nous habitons, le territoire des choses réelles, et l’Autre monde. Dans celui-là, le « réel » ne se touche pas du doigt, mais par l’imagination. […] Ils évoluent sur les chemins de traverse. Ils palpent la densité de l’ombre dans les forêts sacrées, comptent les vagues, tracent des signes sur des pierres levées, bavardent avec les Sidhes.