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  • Nos livres en 2024 : salons, chiffres et perspectives

    Nos livres en 2024 : salons, chiffres et perspectives

    D’un côté les chiffres, de l’autre les lettres, mais la vie est impossible sans leur conjugaison.
    A.Compagnon, La littérature, ça paye

    À ce jour les ventes de livres ne sont pas aussi importantes que les années précédentes, à l’exception de l’île où je vis, où l’adage « nul n’est prophète en son pays » ne s’applique pas. Cela est également vrai pour mon tome I « Louison », mon premier roman pour adultes, dont les ventes progressent.
    Depuis notre première participation aux Salons du livre de la région en 2022, on constate une baisse de la fréquentation et des ventes. Paradoxalement, le nombre d’auteurs(es) présents est en hausse.


    Salons du Livre : rencontres, réflexions,

    Au cours de nos participations aux Salons du livre de ce dernier trimestre 2024, en particulier pour les livres jeunesse, pour lesquels nous formons un duo complice avec l’illustrateur, que ce soit à Josselin en septembre ou à Férel et Riantec en novembre, nous avons toujours reçu un accueil chaleureux : bienveillance, cafés et viennoiseries offerts, parfois un apéritif accompagné d’un discours du maire, et un déjeuner dans une ambiance détendue et amicale. Nous sommes reconnaissants pour toutes ces marques d’attention.
    C’est toujours un plaisir de se retrouver entre auteurs(es) pour échanger sur nos difficultés, nos inspirations et aspirations, nos expériences avec les libraires.

    C’est dans ces moments, autour d’une table chaleureuse et conviviale, que nous apprenons à mieux nous connaître, au-delà de notre passion commune pour les livres.

    Nous y retrouvons les « Auteurs du pays de Vannes » les auteurs(es) de l’AEB (association des écrivains bretons), nous réalisons nos échanges habituels de livres, savourant le plaisir de découvrir les œuvres d’autres auteurs(es) indépendants de la région.

    Lors de certains Salons, des éditeurs indépendants de la région présentent leurs collections, sur la Bretagne, ses légendes. Des conférences sont tenues sur une variété de thèmes, les plus récentes portant sur la botanique, le druidisme, les sorcières, le Grand Nord et l’Islande, sujets qui captivent plusieurs membres de notre groupe, y compris moi-même. Des expositions sont organisées, présentant des planches botaniques, des photographies, des peintures et des dessins ; de nombreux auteurs(es) illustrent leurs livres.


    Chaque année, des auteurs(es), jeunes et moins jeunes, embarquent dans l’aventure exaltante de l’écriture, de l’édition et de l’autoédition. On échange, on tente de répondre à leurs questions, en s’appuyant sur notre modeste vécu et celui de notre entourage : quelles sont les opportunités de vente lors des Salons du livre ? Lors des séances de dédicaces ? Nous débattons également des coûts d’impression et de la question cruciale : est-il préférable de se faire éditer ou de s’autoéditer ? Qu’en est-il des distributeurs ? Les réseaux sociaux, s’ils sont alimentés régulièrement, tiennent-ils leur promesse d’attirer des lecteurs ? Et quid des frais de déplacement, parfois d’hébergement ? Des cotisations à l’Urssaf ? Les jeunes auteurs adoptent souvent une approche pragmatique et précise. Ils aspirent à vivre de leur plume, mais ils s’inquiètent sur la possibilité de le faire en maintenant un budget équilibré ; beaucoup font preuve de prudence dans leurs dépenses, attitude compréhensible dans le contexte économique actuel.

    Leurs réflexions m’ont inspiré l’idée de créer des fiches détaillées pour chacun de mes livres. Prendre du recul ou changer de perspective est essentiel pour y voir plus clair. Leur fraîcheur me pousse à réévaluer mon travail et à m’interroger. Certains sont très actifs, ils s’inscrivent à des formations, participent à des ateliers d’écriture, partent en quête d’éditeurs. J’apprécie leur vision renouvelée du métier.

    Faisons-les lire, puisque la lecture est le verrou, éveillons-les à l’universalité, à l’ubiquité de l’art de raconter des histoires, car on ne transmet rien, on ne convainc de rien sans savoir non seulement compter mais aussi conter.*

    On y rencontre aussi les auteurs* établis, les reconnus, les auteurs du pays, souvent anciens enseignants de français, publiés par divers éditeurs, qui s’adressent à un lectorat déjà acquis pendant leur carrière, à des lecteurs locaux qui retrouvent leurs paysages dans leurs récits ; des lecteurs(es) fidèles, qui malheureusement, ne cherchent pas toujours à explorer de nouveaux titres ; l’expérience de ces écrivains est précieuse, même si j’ai remarqué qu’ils partagent peu leur savoir et leurs conseils, (heureusement pas tous😉).

    *J’ai délibérément utilisé le terme « auteurs » sans le féminin dans ce paragraphe, car jusqu’à présent, dans les salons littéraires que j’ai fréquentés, les invités d’honneur étaient toujours des hommes. Lorsque j’ai rencontré des autrices « célèbres », comme au Salon Livr’à Vannes, elles se sont montrées plus enclines à partager leur savoir et leur expérience. Pas de propos féministe ici, même si je défends la place des femmes dans la littérature, dans l’éducation et dans les distinctions, et que j’aimerais que leurs noms soient plus souvent mentionnés.
    Il est temps que les femmes invisibilisées redeviennent visibles, car les références sont souvent masculines, à l’exception de Colette et de Marguerite Yourcenar, de l’Académie française, mais il y en a tant d’autres. C’est comme pour les biopics, c’est presque toujours Colette, surtout son époque au music-hall, elle est tellement plus que ça. George Sand, mais pas seulement sa liaison tumultueuse avec Musset ou Chopin, elle est bien plus que cela. Et La comtesse de Ségur ? Ce serait passionnant. Vous noterez qu’il y a beaucoup plus de biopics sur les anglo-saxonnes et les américaines. (Je ne parle pas des autrices contemporaines qui ont heureusement plus de visibilité).
    Je reviendrai un de ces jours pour proposer une liste d’autrices, à ne pas oublier, et des biopics littéraires .

    Ainsi, après les Salons du livre de cet automne, je me suis intéressée pendant quelques jours aux chiffres plutôt qu’aux lettres. En déduisant les frais d’impression, les charges de l’Urssaf, les 30% alloués aux libraires, la location de voiture (le vélo étant mon moyen de transport habituel car je réside sur une île), et l’essence (lorsque le covoiturage est impossible) ; la colonne des bénéfices (de mes fiches) m’a paru bien modeste ; sans même inclure les frais d’inscription à certains Salons du livre (nous sommes souvent invités à des événements où la participation coûte seulement 5€ voir 15€, ce qui est raisonnable lorsque cela vient des auteurs(es) qui organisent, pour couvrir les dépenses des flyers, affiches et publicités) mais il y a de grands Salons du livre où la participation est très onéreuse.

    Les Marchés de Noël, souvent organisés pendant les week-ends, connaissent généralement de bonnes ventes, notamment pour les cadeaux destinés aux enfants et petits-enfants, le livre est encore perçu par beaucoup comme un bien précieux. Cependant, les frais d’inscription dans les grandes villes sont élevés, ce qui nous amène à privilégier les localités périphériques telles que : Arradon, Baden, Séné, St Avé, Île d’Arz, Le Bono, etc. Étonnement ces marchés attirent un public nombreux et enthousiaste.

    À travers cette réflexion, je ne cherche pas à justifier une dépense en particulier, mais plutôt à les cumuler pour déterminer ce qu’il me reste effectivement.


    Le cumul ?

    J’ai lu récemment le dernier livre d’ Antoine Compagnon, « La littérature, ça paye », les pages traitant de l’accumulation des bonnes choses m’ont paru très pertinentes.


    Quelques extraits de ces pages :

    « Impossible de quitter Merton sans évoquer l’une des plus belles trouvailles de ce poète des sciences sociales, ce qu’il a nommé « l’effet Matthieu » par allusion à l’Évangile selon Matthieu : « Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas on ôtera même ce qu’il a » (13, 12). L’effet Matthieu désigne l’avantage cumulatif procuré durablement par un mince écart initial, par exemple entre le dernier reçu et le premier recalé à un concours. […]


    […] Bien plus conséquent est un concours réussi à vingt ans, car il laisse toute une vie pour accumuler les avantages liés à une barre précocement franchie. C’est pourquoi, quelle qu’ait été la part du mérite, toute personne ayant passé cette barre dans sa jeunesse, se trouvant en situation de bénéficier de plusieurs décennies d’avantages cumulatifs liés à l’effet Matthieu, hérite aussi de lourdes responsabilités vis-à-vis des moins favorisés par les Parques.
    Mérite, ai-je rappelé, vient du grec méros, la « part ». Mériter, mérizô, c’est « partager », mais le verbe a encore un autre sens : « se souvenir », comme dans memor et memoria. Mériter, avoir bénéficié du mérite, impose de se souvenir. Or l’effet Matthieu, « donner à celui qui a, ôter à celui qui n’a pas », est d’autant plus puissant que l’on se situe sur un marché du type winner takes all, où le gagnant emporte toute la mise, ce qui est le cas dans le sport et le divertissement, mais aussi dans la recherche scientifique et, dans une certaine mesure, dans la culture et en littérature. […]


    […] Dans l’univers de la musique ou de la mode, l’effet Matthieu se transmue en effet superstar, car de minces différences de talent entraînent d’immenses écarts de notoriété et de revenus. Qui bénéficie d’un infime avantage initial, parfois dû à la chance, sera propulsé vers les plus hauts succès par le mécanisme des avantages cumulatifs et le principe du « gagnant rafle tout », comme les Beatles en face des autres groupes de Liverpool qui ne rencontrèrent pas leur Brian Epstein en 1961, ou Taylor Swift, première artiste du spectacle à figurer sur la liste des milliardaires de Forbes grâce à ses seules chansons (The New York Times, 3 avril 2024). […]


    […] En matière de culture, s’il ne crée pas de distorsions aussi dramatiques que dans le sport, le divertissement, la mode ou la science, l’effet Matthieu ne creuse pas moins les écarts. Entre le lauréat du prix Goncourt et ses concurrents de la dernière sélection, d’ordinaire tout aussi méritants ou déméritants, la plus-value s’élèvera à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires vendus. Merton souhaitait que des remèdes soient trouvés afin que l’inégalité entre « the have and the have-not » dans les sciences ne devienne pas explosive. C’était aussi le propos de Bruno Racine dans son rapport de 2020 sur L’Auteur et l’acte de création : corriger l’effet Matthieu toujours grandissant entre les best-sellers et les rossignols. Pour être complet, ajoutons qu’un « effet Matilda », symétrique de l’effet Matthieu, sert à décrire le déni récurrent ou la minimisation systémique de la contribution des femmes à la science.

    Les résultats de leurs recherches ont été souvent attribués à leurs collègues masculins, comme dans le cas de Rosalind Franklin auprès de Crick et Watson pour la découverte de la structure de l’ADN, ou de Marthe Gautier pour la découverte de la trisomie 21, dont Jérôme Lejeune a revendiqué la paternité. Tout laisse à penser que l’effet Matilda s’applique aussi à la culture et à la littérature, que la lettrure paye moins pour les êtres humains de sexe féminin assigné à la naissance.


    En cette fin d’année 2024, ma collection issue de rencontres avec des auteurs(es) indépendants dans les salons littéraires s’élève à 21 titres, un chiffre modeste comparé à mes autres lectures, mais en 2 ans c’est déjà une belle découverte de ce qui s’écrit localement. Je ne suis pas certaine de vouloir et de pouvoir les lire tous, surtout qu’au dernier Salon nous étions 70 auteurs(es) 🧐 — Et je ne vous ai pas parlé des livres qu’on m’a offerts, de ceux que j’ai trouvés dans une boîte à livres, de ceux pour lesquels j’ai craqué en librairie, ni des trésors que je découvre toujours dans la bibliothèque de mes parents😊.
    Le monde regorge de personnes créatives et talentueuses. Il est vrai qu’il y a encore des monstres, mais apprenons à reconnaître les aspects positifs en cette fin d’année tumultueuse.

    Je vais m’arrêter là pour cette année, pour la bonne raison que, quand j’écris, je lis peu de romans, je me concentre principalement sur la documentation concernant les sujets de mon livre en cours. En tant qu’autrice, je m’applique à faire des recherches, de manière approfondie, sur le sujet qui me passionne ; que ce soit en histoire, en science, en géographie, en médecine, etc. je m’abstiens de lire des fictions durant le processus créatif.


    Les ventes ont été plus modestes cette année, comme je le disais en intro (excepté mon roman), surtout lors des Salons du livre (je vous raconterai les marchés de Noël dans un prochain article, il m’en reste encore quelques-uns à faire).
    Cependant les rencontres avec les auteurs(es), avec les lecteurs(es), les retours de lectures, les échanges chaleureux et la découverte d’autres univers, rendent ces instants précieux, des moments de partage et d’enrichissement mutuel.

    À condition que les frais ne dépassent pas les recettes😉🤔.

    La littérature est un besoin naturel de l’être humain que même la maladie des coûts n’anéantira pas ; la demande de littérature dans la société ne cesse de croître, comme recherche de compétence narrative et poétique, certes pour des motifs plus ou moins avouables, tels que vivre mieux et gagner plus. Les littéraires seront les derniers à s’en apercevoir, à découvrir que la littérature est toute-puissante […]



    *Les citations de cet article sont d’Antoine Compagnon, tirées de son dernier livre, La littérature, ça paye.

  • Les déambulations d’Archibald Appelton

    Les déambulations d’Archibald Appelton

    de Bernard Soubirou-Nougué

    Un très bon roman.

    Sous le voile du secret comme sous celui de la nuit, chacun dissimule sa vraie vie, celle qui présente le plus grand intérêt.

    A. Tchekhov

    Si vous aimez l’histoire, la petite et la grande, ce livre est fait pour vous. Si vous êtes attiré par les récits d’amour, les amitiés complexes et troublantes, la passion ardente, intense et tragique, les apparitions, les amours éphémères abordés avec humour, alors cette lecture vous est destinée.

    Si les enquêtes policières, les mystères et les complots vous captivent, si vous prenez plaisir à déceler les indices, Archibald Appelton vous entraînera dans son histoire extraordinaire jusqu’à la toute dernière phrase.

    Je l’ai lu en 2 jours, durant un week-end de pluie et de vent, c’est assez courant ces derniers temps, l’automne joue les prolongations… Mais peu importe, soirée d’hiver, d’été, après-midi pluvieux, en compagnie d’Archibald Appelton on ne s’ennuie jamais. On rit, on sourit, on adhère à ses colères, on est secoué et ému par les tumultes de la grande Histoire et ses tragédies, on aime passionnément, et on nourrit de grands espoirs pour lui…

    La lignée est-elle cruciale ? Qu’en pensez-vous ? Avec l’âge, les questions sur l’ascendance et l’au-delà semblent émerger inévitablement.

    Je le relirai probablement, pour moi c’est le signe d’un bon roman. Je découvrirai sans doute de nouveaux éléments, et je me laisserai volontiers tenter par une autre balade à la pointe du Bill, près de ce pin majestueux, à Moustérian, cet endroit enchanteur.

    Le style de Bernard se caractérise par une prose élégante, fluide et poétique, animée par un personnage principal attachant. Vous trouverez de nombreuses palettes dans les personnages secondaires, des contrastes qui enrichissent et approfondissent le récit.

    Il est reconnu que lorsque cinq individus assistent au même événement, il existe cinq perceptions différentes. Nos jugements ne sont jamais objectifs ; nous sommes inévitablement subjectifs.

    Ceci est mon humble avis de lectrice : si vous souhaitez vous forger votre propre opinion, explorer les profondes interrogations d’Archibald (je l’appelle par son prénom, nous avons partagé un moment à travers ces pages), ses soucis, les rebondissements qui parcourent sa vie, l’incroyable dénouement de l’histoire, je vous recommande vivement de lire ce livre.

  • Fête des Voiles Rouges

    Fête des Voiles Rouges

    Livr’à Vannes

    Exp.éditions imaginaires ne participera pas au Salon du livre de Vannes cette année, nous n’avons pas publié de nouveaux titres dans les délais fixés par le comité de lecture du Salon.
    Rendez-vous en 2025 pour le tome II du roman de Marie an Avel : « Les souvenirs oubliés sont-ils perdus à jamais« . Nous avons hâte de retrouver les lectrices et lecteurs de ce diptyque littéraire lors de cet événement. Nous souhaitons un excellent Salon et de fructueuses ventes à nos confrères et consœurs présents ce week-end.

    Exp. éditions imaginaires



    TOME II

    Depuis deux ans, je me consacre à l’écriture de ce second volume, entrecoupée de pauses — pour manger, dormir, me balader avec mon chien, observer les cygnes, canards, lapins, ragondins, aigrettes, hérons et autres oiseaux de l’île, accueillir mes petits-enfants et enfants, rendre visite à mes parents, etc. Ce tome me transporte dans une aventure pleine de rebondissements, il met ma plume à l’épreuve, suscitant tour à tour embarras, sourires et étonnement, dans un livre à la structure captivante. J’essaie de jouer avec le suspense, je retiens certaines informations, j’apprends à utiliser le flash-back… Entourée de post-it, de notes avec des codes couleur affichés au-dessus de mon bureau, je passe des heures à faire des recherches, géographie, histoire, divers métiers, et le temps s’envole… L’écriture est un processus en deux étapes, mais vous ne verrez que le résultat final, la partie émergée de l’iceberg. L’auteure doit en savoir beaucoup plus sur ses personnages que ce qu’elle (il) met dans son livre.
    Mes personnages luttent avec leur existence, vivant une aventure tant interne qu’externe. Cela prend la forme d’un roman long et ample. Le lecteur pourra s’immerger longuement, peut-être sur plusieurs semaines. Je n’ai pas de leçon à inculquer ni de solution toute faite, mais j’aime explorer ce qui nous remue, nous agite. Ici il s’agit de la famille, des liens intergénérationnels, dans ce monde où nous vivons, qui nous influence et nous traverse.


    Fête des Voiles Rouges

    Ce week-end, je vous invite à nous rejoindre à Port-Anna, Séné, dans le golfe du Morbihan, pour célébrer la fête des Voiles Rouges. Nous serons entourés d’une dizaine d’autres auteurs et autrices sur la terrasse du restaurant Ty-Anna. Nous aurons le plaisir de vous présenter nos ouvrages et, en exclusivité, une prévisualisation d’une exposition prévue cet été, avec des œuvres de l’illustrateur Sylvano Bulfoni, inspirées par la mer et les bateaux, (dont un en particulier) ce sera une surprise !
    Nous espérons que le soleil brillera lors de cet événement et nous avons hâte de rencontrer ou revoir beaucoup d’entre vous, passionnés de la mer, de l’art et de la littérature.


    Deux livres qui parlent, d’île, de mer, de navires…

  • Au bonheur des Ogres

    Au bonheur des Ogres

    Bienvenue dans la drôle de famille Malaussène

    Benjamin  l’aîné d’une adorable fratrie plutôt décalée en a également la charge puisque leur mère a le don de partir à chaque fois qu’elle tombe amoureuse, laissant tous ses enfants sous son entière responsabilité. Benjamin  prend son rôle de soutien de famille très à cœur même s’il passe pour un imaginatif lunaire et rêveur, il a le don de transformer la réalité en un délire coloré pour le plus grand plaisir de toute sa tribu ; c’est un magnifique raconteur d’histoire.

    Mais il a aussi un  travail sérieux et rémunérateur (il est vrai un peu particulier), il est « responsable technique » dans un  grand magasin. Non, en réalité il est « bouc émissaire » du service après vente : il est payé pour prendre de copieuses engueulades lorsqu’un client vient se plaindre. On assiste à un défilé d’irrésistibles scènes comiques et une ­galerie de portraits remarquablement choisis, tout cela dans le but que le client ne porte pas plainte.


    Au milieu de ce quotidien qui ne manque pas de fantaisie, de mystérieuses explosions sévissent dans le magasin, faisant plusieurs victimes. Benjamin qui se trouve à chaque fois non loin de la catastrophe va devoir une nouvelle fois faire le bouc émissaire. Mais là l’affaire n’est plus du tout comique. Grâce à une journaliste têtue et énergique, et qui n’a pas l’intention de s’en laisser conter, il va malgré lui se lancer dans une enquête et avec son aide essayer de prouver son innocence.

    Pour se faire, l’ensemble de la tribu familiale va participer activement, créant des situations cocasses et touchantes.

    les trois acteurs

    Un délice, un régal, un film de pur plaisir,
    la magie du film nous emporte .

    Raphaël Personnaz en benjamin lunaire est très drôle. On croit sans sourciller à sa fantaisie et à son drôle de métier de bouc émissaire. C’est la grande idée du livre et le film en garde toute la saveur.

    L’exubérance de la tribu Maulaussène est la face lumineuse du récit. Le coté sombre, les attentats sanglants et les disparitions d’enfants sont relégués à l’arrière-plan. Cependant  l’ombre est bien présente. Est-il réellement nécessaire d’en montrer plus pour comprendre l’histoire. Le réalisateur a réussi à faire passer le message sans alourdir le propos et ouvre ainsi le film à un grand nombre de spectateurs. C’est une grande réussite.

    J’ai souri, éclaté de rire, je me suis amusé, j’ai déjà envie de revoir le film et de le partager.
    Il y a une belle énergie de la part des comédiens, tous parfaits dans leurs rôles, une grande drôlerie et un charme incontournable des enfants. Une famille excentrique, débordante de fraîcheur et de charme, une famille solidaire, forte, pleine de cet amour qui donne des ailes à la vie (même si tout n’est pas si rose et que les ogres ne sont jamais loin…). Un bol de fraîcheur que je reprendrais bien chaque matin.
    Nicolas Bary a choisi de mettre en avant le bonheur, les « Ogres » ont eu la deuxième place. Un metteur en scène qui mise sur la joie et la fantaisie dans nos salles de cinéma remplis d’hémoglobine et de violence,  je lui fais ma révérence.

    Au bonheur des Ogres, roman de Daniel Pennac paru en 1985 chez Gallimard , est le premier livre mettant en scène la famille Malaussène. Cette famille bien étrange sur plusieurs aspects est surtout liée par un amour inconditionnel de ses membres les uns pour les autres, même si cela se passe dans un environnement farfelu. L’écriture de Daniel Pennac est un vrai plaisir. À chacune de ses pages, on sourit d’attendrissement pour les différents protagonistes, on sourit de plaisir tellement les jeux de mots sont drôles, on éclate de rire tellement les situations sont cocasses. Au Bonheur des Ogres est un concentré de fantaisie, de loufoquerie, un roman absolument captivant.

    Nicolas Bary - Daniel Pennac

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  • Du domaine des Murmures

    Du domaine des Murmures

    De Carole Martinez

    Une tragédie, avec toute la désespérance de ces histoires vouées à un destin fatal.

    L’histoire en quelques mots :

    En 1187, Esclarmonde refuse le mariage arrangé voulu par son  père. Elle tourne le dos aux traditions de l’époque, aux convenances de son rang et le jour de ses noces dit non à Lothaire de Montfaucon. Elle ne veut pas être sous les ordres d’un seigneur, d’un maître. Elle demande à vivre une vie de recluse et s’enterre vive dans une cellule de 4 m2 avec une fenestrelle pourvue de barreaux, attenante  à la chapelle du château. Le matin juste avant son emmurement, un homme la viole dans la forêt. Esclarmonde se tait et commence sa vie de recluse.

    Quelques mois passent et l’enfermée donne inexplicablement naissance à un garçon. Si elle sait que cette conception n’a rien d’immaculé, son entourage, lui, crie au miracle : « Je n’avais pas menti, je m’étais contentée de taire une vérité que personne n’avait envie d’entendre, et mon silence m’avait offert un espace blanc à brader, un vide dont chacun s’était emparé avec délice. » Le monde extérieur la considère comme une sainte. Elle devine les âmes et reçoit les confidences des pèlerins qui viennent à elle ou lui laissent des messages grâce au « réseau des emmurées ».
    « Je n’avais jamais tant reçu, tant parlé. » Depuis sa petite fenêtre aménagée dans ce qui ressemble à un tombeau, la jeune fille de 15 ans devient celle par qui le bien arrive, celle qui offre la rémission des péchés et auprès de qui la communauté se purifie.

    Cet enfermement est pour elle une évasion. À 15 ans, elle dit non à son père et se soustrait au joug de la condition de femme du XIIe siècle.
    Ce qu’elle qualifie de « mort » est pour elle  un espace de vie : elle force l’existence à lui offrir une place dans un monde gouverné par les hommes et la religion.

    Seulement ce qui semble un temps une forme d’évasion va se révéler insupportable, et le mot tombeau, enterrée vivante, prendra alors toute la dimension de son horreur. Le choix de ses 15 ans lui deviendra insoutenable. « […] un calvaire dont cette pauvre idiote n’avait jamais rêvé », dit-elle en parlant d’elle-même. Elzéar, son enfant, la quitte car il doit vivre une vie normale et bientôt il ne pourra plus passer par la fenestrelle. Puis un clerc se présente au château et lui demande de faire vœu de silence éternel. Son père a tout avoué sur la naissance de son petit-fils avant de mourir. L’église veut la condamner, veut encore plus, elle veut coudre la bouche pour s’assurer le secret de la naissance de l’enfant.

    « Comment pouvait-on me mutiler ainsi ? J’avais choisi de me clôturer, non de me taire. Cette fois la recluse volontaire se changeait bel et bien en prisonnière et je n’étais plus seulement la captive de la jeune fille de quinze ans qui, n’imaginant son bonheur qu’en Dieu, avait fait ériger cette chapelle, de cette naïve damoiselle des Murmures persuadée de gagner la béatitude et la liberté en s’emmurant vivante, d’une innocente qui ne savait encore rien du monde et ignorait à quel point un être peut changer. »

    Il y aura bien une femme, magnifique, pleine de vie, une véritable alliée qui lui proposera de l’aider. Bérangère, lui dira que rien n’est encore impossible, qu’elle peut sortir de son tombeau, qu’un mur est destructible. Comme on l’aime cette Bérangère, on a envie de l’aider, on a envie de lui trouver des marteaux , des outils efficaces pour enfin détruire cette tombe et libérer la recluse qui ne supporte plus sa condition et se rend enfin compte de l’abomination de son choix. Mais il y a la parole donnée. Elle lui propose alors d’être son émissaire et d’aller voir le pape à Rome pour qu’il la libère de son vœu. Car lui seul peut rouvrir dignement son sépulcre. Mais c’est sans compter sur les villageois rassurés par la présence d’une sainte à proximité, sur ces pèlerins qui ont besoin de se libérer de leurs péchés, Esclarmonde est leur garantie pour le paradis.
    « Que deviendraient-ils si la recluse revenait sur sa parole ? »

    J’ignorais qu’il arrivait que le menu peuple, aveuglé par la terreur, commît des meurtres pour qu’un saint ne quittât pas son pays.

    esclarmondeOrigine et étymologie de ESCLARMONDE:

    Esclarmonde est un prénom féminin issu de l’occitan esclarmonda, c’est-a-dire « éclaire le monde ». Ce prénom fut très répandu jusqu’à la fin du Moyen Âge dans toutes les régions d’Europe grâce à la chanson de geste Huon de Bordeaux dans laquelle le héros, protégé par le nain Obéron, réussit à conquérir Esclarmonde. Il est aujourd’hui assez rare.
    Esclarmonde célèbres : Esclarmonde de Foix, et plusieurs autres Parfaites du catharisme.

    Un conte médiéval, un souffle épique

    Mon avis de lectrice

    plume-et-encrier

    Une belle écriture, un beau souffle, le livre se lit facilement et nous emporte rapidement à cette époque lointaine du Moyen âge. Il nous donne une vision de ce moment de l’histoire, juste (bien documenté) et sans grande envie d’y retourner. Le sujet est intéressant, la condition des femmes de cette époque, la place imposante de la religion. Si l’auteure ne s’était pas lancé dans la surenchère aux souffrances elle aurait pu ravir totalement mes heures de lecture.

    C ‘est une tragédie, avec toute la désespérance de ces histoires vouées à un destin fatal. À travers le choix de l’emmurement, Esclarmonde va vivre une vie de recluse. Prisonnière à vie mais sans les régulières sorties et déplacements accordés à des prisonniers entre guillemets normaux. Un choix extrême, insupportable pour le commun des mortels. À travers cet état d’enfermement volontaire il y avait déjà beaucoup à dire. Pourquoi surenchérir avec le supplice de l’enfant, le viol, le vœu de silence. Vous me direz cela aurait fait un autre livre, et ces choix apportent des questions et une évolution au personnage. Cela lui permet de se rendre compte de l’horreur de son choix. C’est vrai, mais tout ce vocabulaire autour de la souffrance, de la douleur, de l’horreur, éveille chez moi une sorte de rejet. C’est un univers beaucoup trop sombre.

    bisnounours

    Notre époque aime particulièrement les univers sombres et torturés que ce soit au cinéma, à la télévision ou dans les livres. Je recherche autre chose dans les pages d’un livre. Je ne dis pas non plus que je ne désire lire que des livres qui se passeraient au pays des Bisnounours, un pays féerique, une histoire sans danger ne sont fidèles à aucun monde … cependant …
    Ce genre de lecture ne m’apporte rien, ne m’ouvre aucune fenêtre, ne répond à aucune de mes questions, ne me fait ni rêver, ni voyager. Mon avis ne concerne bien sûr que moi, ce livre a eu de nombreux prix, il ne sera pas en danger avec mes mots. Je sais de par mes efforts pour trouver quelque chose à lire, que mes goûts ne sont pas communs, ce n’est ni orgueil, ni sentiment de supériorité de ma part, c’est juste un constat.

    Dans la lecture je cherche l’évasion, je cherche à m’échapper du goût pour le morbide de notre civilisation, je cherche l’ouverture, des aspirations nouvelles, des notes d’espoir.

    Ceci est mon avis de lectrice, à un âge de la vie plus avancé que celui d’Esclarmonde et des collégiens qui l’ont beaucoup apprécié. Peut-être qu’à 15 ans j’y aurais trouvé des réponses, j’aurais vu le Moyen Âge sous un autre regard que celui des historiens classiques. À travers une histoire tout est plus clair. Tout semble plus vrai. J’aurais compris le danger des religions, le danger des choix extrêmes à un âge où on est en perpétuel changement et sous influence.

    Ceci pour dire que c’est un bon livre, bien écrit, sensible, extrêmement dramatique. Et qu’il porte sur des questions et des réflexions intéressantes et profondes. Mais aujourd’hui je cherche autre chose dans la lecture et après des journées remplies de famille et de travail, cernée par des actualités toutes plus sombres les unes que les autres, je cherche des livres porteurs de lumière, même si dans leur contenu il peut y avoir des passages difficiles. Il faut que le fond porte de la lumière.


    Échange sur le livre avec Sido

    Sido — Un livre inoubliable…
    Marie — C’est vrai, difficile d’oublier un tel destin. Carole Martinez est une raconteuse d’histoire et nous emporte très vite aux cotés d’Esclarmonde. Cependant c’est un univers très sombre pour lequel je ne développe pas une grande affinité en ce moment. Même si en effet c’est une incroyable histoire, très bien écrite, j’ai envie de lire autre chose. Il y a des jours comme ci et d’autres comme ça … j’ai envie de sourire avant de m’endormir.
    Sido — Je comprends, c’est très oppressant. Je me souviens l’avoir lu d’une traite, ainsi j’ai évité à l’angoisse de trop s’immiscer…
    Marie — C’est peut-être une bonne façon de la lire. La lecture en soirée, (ce rendez-vous quotidien du soir), dans cet univers sombre et pesant, après une journée parfois difficile m’a été à certains moments indigeste. C’est une  histoire qui ne laisse pas indifférent, l’extrémisme de la religion, le peu de choix des femmes, les guerres et les violences… tout un pan de notre civilisation. Qui n’est d’ailleurs pas encore totalement révolu, même s’il se vit autrement. Ce qui m’a parfois gêné c’est la surenchère aux violences, à la noirceur, certains passages auraient pu être évités ou traités autrement. Mais heureusement on a le droit de sauter des pages, le droit de ne pas finir un livre … (*Daniel Pennac).
    Sido — Je suis entièrement d’accord avec vous. C’est un peu le travers du style d’aujourd’hui, beaucoup de livres sont pressentis pour devenir des scénarios de cinéma et doivent répondre à certains critères. Cette histoire c’est le symbole de « l’enfermement » de la femme, dans un sens propre et figuré, en tant que femme on vit dans une tour, murée ou non, psychologique, conscient ou inconscient. Beaucoup de femmes doivent se battre au quotidien pour passer outre des murs visibles ou invisibles…souvent impalpables, mais réels. C’est le livre de la dignité et du Courage, de la douleur physique et morale anesthésiée, soulagée par la croyance en quelque chose de plus grand que soi. Mais loin de moi l’idée d’une supériorité quelconque de la femme. Et Pennac a tout à fait raison ! C’est un homme que je respecte profondément. Il y a un livre que j’ai trouvé insoutenable ainsi, c’est Les Bienveillantes de J.Littell. Je ne suis pas allée au-delà des 20 ou 30 premières pages. Intéressant de savoir la limite entre ce qui est descriptible ou pas. Vaste débat.

    Réflexion autour de l’univers du livre

    « Du Domaine des Murmures » de Carole Martinez, professeur de Français a eu le prix des Collégiens. Pour comprendre l’engouement des jeunes pour le livre, j’ai lu des critiques et écouté divers vidéos avec l’auteure. J’ai entendu dire qu’au départ il était passé inaperçu (c’est assez facile dans le flot des nouveautés quotidiennes qui s’amoncellent sur les tables des libraires) et que grâce aux avis de libraires enthousiastes il avait eu droit à une nouvelle couverture flambante rouge et à une bande concernant ses nombreux prix littéraires. Donc avant le prix des Collégiens il a eu la faveur des libraires, des adultes. Deuxième couverture, deuxième édition, succès. Cette anecdote m’interroge sur le pourquoi et le comment des succès de librairies, des mises en avant de certains livres. Cette interrogation n’a pas un rapport particulier à cette lecture, c’est une question que je me pose devant les livres mis en avant sur les tables des librairies.

    Sommes-nous totalement libres de nos choix de lecture ?


    + (cette réflexion n’a pas de rapport direct avec le livre ci-dessus qui est écrit par une auteure Française, c’est un questionnement personnel)

    Le choix des Éditeurs

    ? […] C’est ainsi, nos éditeurs ont choisi de prendre ailleurs ce qu’ils ont pourtant sous la main ! Ici des milliers d’auteurs sont ignorés. Disons le tout haut, un auteur sans relation ne peut pas être pris dans une grande maison d’édition. Quant au mythe du manuscrit arrivé par la poste et publié chez un gros éditeur, cela relève du conte de fées comme de gagner à l’Euro millions.
    Bien entendu, on ne fera pas un esclandre à propos de Philippe Picquier, un éditeur qui a choisi de faire découvrir l’Asie au public français. Mais pour les autres, il y a de quoi être irrité. Voyez-vous, en France on traduit tout, et ailleurs, notamment chez les Anglo-Saxons, quasiment rien. À l’exception de l’Italie qui aime bien les auteurs français et à qui nous rendons mal la pareille, la littérature française est devenue marginale dans le monde. D’une prétendue supériorité nous sommes à présent tombés dans un autre postulatum, nous voilà à renier notre importance révolue et pire encore, notre futur. Nos propres éditeurs émettent une sentence dédaigneuse contre les auteurs français. Tous occupés à leur mercantilisme, ils rejettent leurs compatriotes en méprisant leurs œuvres, ils passent ainsi à côté d’une chose essentielle, la préservation de la littérature française.

    Article du BibliObS

    En France les éditeurs se passionnent pour la vie de nos politiques. Il suffit de pénétrer dans la plupart des librairies pour le voir.
    Exemple : Le  livre de Cécilia Attias ?
    Est-elle passée par un comité de lecture comme tout auteur édité dans une grande maison d’édition ?
    En tout cas la télévision ne manque pas de lui faire un maximum de publicité. Il paraît qu’elle arrive au top des ventes. Soit sa plume est remarquable, soit notre société est assoiffée des potins de nos dirigeants. Je n’ai pas la réponse … juste une question :
    Qu’est-ce qu’être auteur aujourd’hui en France ?