Catégorie : Publier

Interrogations sur les conditions de la publication

  • La place de l’auteur dans les industries culturelles

    La place de l’auteur dans les industries culturelles

    L’Édition: idées reçues sur l’édition

    par Bertrand Legendre

    Une lecture que j’ai faite il y a peu pour essayer de comprendre le milieu de l’édition d’aujourd’hui, mais également pour essayer de définir mon choix de publication en tant qu’autrice. (éditée ou autoéditée ?)

    Lagardère Publishing, qui fédère les maisons d’édition du groupe Hachette, a réalisé en 2007 un chiffre d’affaires de 2,13 milliards d’euros contre 1,43 en 2004. Cette croissance est en grande partie le résultat des extensions internationales du groupe qui se place ainsi au 6e rang de l’édition mondiale. Quant au deuxième groupe français, Editis, avec 760 millions d’euros de chiffre d’affaires, il est désormais la propriété de l’éditeur espagnol Planeta. Le discours qui a prévalu alors jusqu’à l’effondrement du groupe Vivendi au début des années 2000 tendait à faire des éditeurs, comme des auteurs, des fournisseurs de matière première que les industries numériques auraient eu la charge de transformer en produits culturels et de loisir.
    Si cette perspective appelle toutefois un usage mesuré, elle pose la question de l’évolution de la place de l’auteur dans les industries culturelles.

    Nous sommes aujourd’hui davantage face à un travail de rédacteur multiple – dont les contributions s’entremêlent au fil des rééditions d’un même livre (ebook, broché, poche) – qu’en présence d’un travail d’auteur au sens strict.

    Le statut de l’auteur comme créateur est mis en cause au travers de ces diverses pratiques.

    Perdant son statut de créateur, ce dernier prend alors une fonction de : « fournisseur de contenus ».

    Stars de l’édition – ­Editeurs – qui mène la danse ? Piston ?

    On rappellera à ce sujet le canular qui a suivi la publication de « L’Institutrice » de Claire Chazal en 1997 : après avoir saisi le texte pour lui donner forme de manuscrit, les concepteurs de ce canular l’ont envoyé sous un autre nom d’auteur à différentes maisons d’édition… qui l’ont toutes refusé. Ces vedettes des médias sont en mesure de choisir leur éditeur et de négocier leurs conditions plutôt que l’inverse, elles n’ont donc pas besoin de « piston ».

    En fait, l’idée reçue selon laquelle il faut être pistonné pour pouvoir être publié s’appuie beaucoup sur une représentation idéalisée de l’auteur. Celui-ci serait dégagé de tout ancrage social, construit en dehors de tout champ socio-professionnel et n’acceptant d’autre interlocuteur que la figure majeure de l’éditeur, de préférence patron de maison, dans une relation privilégiée, seul à seul. À voir du piston là où il n’y en a pas, le risque est fort de s’enfermer dans une posture de génie méconnu qui n’est sans doute pas la meilleure pour dénoncer la complaisance.

    Plus souvent, l’accès à la publication relève d’un processus très implicite au fil duquel, à côté des qualités intrinsèques du texte soumis à l’éditeur, sont appréciés divers paramètres : la capacité de l’auteur à se mouvoir dans les médias et à se comporter face au public, l’importance des réseaux informels ou officiels qu’il pourra mobiliser pour contribuer à promouvoir son livre, l’étendue de son œuvre à venir… C’est là une tendance générale qui traverse l’ensemble des industries culturelles : les créateurs sont amenés à prendre une part active dans la carrière commerciale de leur production.

    L’auteur devenu romancier ex nihilo, en étant totalement étranger au milieu éditorial et à la pratique de l’écriture, ne correspond que très partiellement à la réalité des situations. Par ailleurs, la visibilité de l’auteur dans ses réseaux professionnels est une composante importante de la décision de l’éditeur, en ceci qu’elle détermine la légitimité de l’auteur et contribue aussi à assurer son audience, donc les ventes à venir.

    *Réflexion à suivre

  • Publier un roman-feuilleton (2)

    Publier un roman-feuilleton (2)

    Réponse aux commentaires de Sylvano Bulfoni & Carnetsparesseux à propos de mon article précédent sur la publication d’un roman-feuilleton¹.

    Bonjour Sylvano, bonjour Carnetsparesseux,
    Je vous remercie d’avoir pris le temps de répondre aux questions de mon précédent article sur le roman-feuilleton. Ce nouvel article en guise de réponse commune puisque le contenu de vos commentaires va dans le sens d’une approbation à cette forme de publication en ligne, mais également pour poursuivre ma démarche dans ce questionnement. Si d’autres internautes veulent se joindre à nous ils sont les bienvenus.

    La sérialisation, un avantage pour le numérique ?

    Vous avez tous les deux répondu favorablement. Je pense également que la lecture numérique favorise la sérialisation des contenus. Les progrès concernant la publication en ligne permettent de publier un livre sous forme de saga à épisodes chaque semaine, dans la tradition de C.Dickens, Jane Austen, Alexandre Dumas, Eugène Sue, etc. C’est une forme de narration qui connaît beaucoup de succès actuellement.

    La publication d’un contenu sous la forme d’épisodes semble connaître une renaissance dans notre société où règne l’instantanéité. Alors qu’aujourd’hui tout est disponible immédiatement et à portée de clic, la sérialisation oblige le lecteur à attendre, renforçant le suspense et fidélisant l’audience en créant de l’intérêt.

    Comment fonctionne un roman-feuilleton ?

    J’ai lu quelques articles ainsi que des extraits des grands romans-feuilletons du XIXe.
    J’en ai retenu deux règles essentielles :

    N°1 : L’écriture du roman-feuilleton est déterminée par le rythme de la parution, en conséquence, la publication doit posséder un nombre à peu près constant de signes typographiques. J’avais pensé faire une publication bimensuel mais j’ai peur — comme le souligne carnetsparesseux — que le fil soit trop long entre les deux parutions et que le lien texte-lecteur soit rompu.

    N°2 : Il faut maintenir l’intérêt du lecteur, il faut faire en sorte que ce qui est publié chaque semaine se termine sur un suspens. Ce qui a fait son succès au XIXe, c’est ce qu’on appelle aujourd’hui un « cliffhanger », effet familier qui repose sur l’interruption du récit au moment où la tension est à son comble.

    N°3 : Quel que soit le médium, la sérialité cache toujours une même intention : captiver le public, fidéliser le lecteur.

    Cette forme de publication quotidienne en ligne est intéressante, à condition d’avoir terminé l’ensemble du roman à diviser en épisodes/tomes. Difficile de se lancer dans une telle aventure sans avoir préécrit l’ensemble. L’écriture est une tâche artistique mais surtout artisanale, aujourd’hui il me reste encore beaucoup de travail de relectures. Cependant je trouve  que c’est une expérience à tenter.
    Les quatre premières parties des « Mystères de Paris » d’Eugène Sue ont paru dans le journal entre juin et décembre 1842, elles étaient préécrites. À l’origine, la parution dans le journal est conçue comme une prépublication : la destination du roman est avant tout son édition en volumes, au format in-octavo, ce qui explique la présence d’un chapitrage en plus du découpage en feuilletons.

    Les Mystères de Paris

    L’idée du roman-feuilleton m’inspire et m’inquiète à la fois, pour de multiples raisons, d’où mon article précédent et celui-ci.


    Ce qui m’attire et m’inspire :

    1. L’extension du lectorat. Il n’est pas facile de se faire connaître, d’être visible sur la toile où des milliers de livres sont publiés régulièrement. Il y a eu une démocratisation de la lecture constante et progressive tout au long du XIXe siècle grâce en partie au roman-feuilleton. Ce n’est qu’à la moitié du XIXe siècle que l’histoire littéraire dresse clairement une frontière entre les auteurs de roman « feuilletons » et les « grands auteurs » littéraires. Sainte-Beuve, « père de la critique littéraire », affichait un mépris hautain pour ce qu’il appelait non pas la littérature populaire, mais « industrielle ». Un peu ce qui se passe aujourd’hui entre l’édition à compte d’éditeur et l’autoédition.
    2. C’est un genre populaire. Le roman-feuilleton a permis la lecture au plus grand nombre à une époque où l’analphabétisme était importante, il a développé un engouement pour la lecture qui jusque là n’était réservée qu’à une élite, l’aristocratie. La sérialité est intimement liée aux préoccupations économiques qui s’emparent de l’industrie culturelle de masse dans la première moitié du XIXe siècle, mais il ne faut pas réduire ce procédé à une simple stratégie mercantile visant à asservir le consommateur avide. Non seulement la sérialité a un impact décisif sur chacune des étapes allant de la création à la consommation du récit, mais elle est également à l’origine d’une esthétique singulière, qui ignore les préceptes sur lesquels reposent l’institution des belles lettres et l’idéal romantique.
    3. Il a permis aux auteurs de vivre de façon plus régulière de leur plume. Les romans-feuilletons touchent une audience immense qui leur offrent de meilleures perspectives de rémunération.
    4. Extension du public qui lit, goût de plus en plus manifeste pour le roman, démocratisation de la presse par l’abaissement du prix. Une série de facteurs qui nous permettent de comprendre pourquoi le roman-feuilleton est devenu un genre considérable.
    eugene-sue

    Ce qui m’inquiète :

    1. Le rythme de publication. Il faut trouver le bon.
    2. Le temps limité entre les épisodes
    3. L’interactivité. Le lecteur peut intervenir entre les publications. L’auteur qui rédige son œuvre au fur et à mesure des parutions successives, doit-t-il tenir compte des nombreux commentaires que ses lecteurs lui transmettent ?  Personnellement je ne m’en sens pas capable.
    4. Le suspense lié à la fonction d’argument de vente. Il faut tenir le lecteur en haleine, piquer sa curiosité, de manière à le fidéliser et à lui inculquer des habitudes de lecture.
    5. L’importance du découpage, la composition des chapitres (épisodes). Démultiplication exponentielle des intrigues, qui se chevauchent et s’entremêlent dans le flot discontinu du récit. L’accumulation d’événements et de personnages qui donne lieu à des jeux de contrastes savamment orchestrés.

    Soumis à une pression constante et à un rythme d’écriture insoutenable, l’auteur est souvent contraint de recourir aux services d’un pair, ces auteurs « nègres », presque toujours laissés dans l’ombre, qui aident à la rédaction du roman. À l’instar des multiples formes de plagiat qui envahissent l’industrie littéraire de l’époque, le recours à des auteurs multiples vise à accélérer le rythme de production et à faire en sorte que les délais imposés par le marché soient respectés. Voir l’ampleur de la contribution de « Maquet » dans les œuvres attribuées uniquement à « Dumas ». Une méthode de travail insolite, un rapport de complémentarité d’une incroyable efficacité.


    Comment mettre le feuilleton à disposition du lecteur, où le vendre ?

    • Sur le blog ?  Il faudrait mettre en place une application et c’est coûteux. Impossible à gérer.
    • Sur une plateforme de vente en ligne ? Amazon, Kobo/Fnac, Smaswords, iBooks, etc.
    • Ailleurs ? Si vous avez des idées…
    • Quel tarif par épisode ?
    • Tenir compte du coût au moment de sa publication au format broché, je pense que la somme de 2,99€ est raisonnable et correct.
    ecrire

    Article un peu long, mais j’ai encore besoin de mettre ma réflexion au clair avant de me lancer dans l’aventure. C’est aussi un partage pour ceux qui écrivent et cherchent à publier différemment. Il reste à trouver la bonne manière de le diffuser et le bon rythme à adopter pour chacun (auteur et lecteurs).


    Pour en savoir plus sur le roman-feuilleton  :
    ¹ roman-feuilleton : Le roman-feuilleton naît en Angleterre au XVIIIe siècle, grâce à Daniel Defoe qui déchaîne les passions des lecteurs anglais avec les aventures de Robinson Crusoé. Il se développe en France dans les années 1830-1840 avec l’apparition d’une presse populaire bon marché. Il est alors le fruit d’une alliance ingénieuse et opportuniste entre des romanciers de talent et des directeurs de journaux qui trouvent, de part et d’autre, de grands avantages financiers à cette collaboration. Le premier roman-feuilleton publié, en 1836, est un roman de Balzac intitulé « La vieille fille ».
    Pourquoi ce type de roman s’appelle roman-feuilleton ?
    Ce terme a un rapport avec l’organisation de l’espace de la page du journal. On appelle feuilleton, en terme journalistique du XIXe siècle, la partie inférieure de la page du journal, le « rez-de-chaussée ». Une habitude s’est installée dans les années 1830 de consacrer le bas de cette page à l’impression de textes littéraires ; de là découle l’expression « roman-feuilleton ». On est passé du terme technique désignant l’emplacement, à la désignation du type de texte ainsi publié.

    Mais même si Balzac est l’inventeur du genre, ce n’est pas lui qui compte parmi les grands auteurs de roman-feuilleton. Il y a une trilogie, assez facile à retenir : Alexandre Dumas, Eugène Sue et Frédéric Soulié. Ces auteurs vont occuper une place considérable dans la presse, puisque les chiffres de vente des quotidiens auxquels ils vendent leurs romans-feuilletons vont augmenter considérablement grâce à l’intérêt que présentent ces romans pour les lecteurs. Le roman-feuilleton est un phénomène économique ; c’est donc aussi un phénomène en rapport avec la sociologie de la littérature.

    Je lisais tous les jours, dans Le Matin, le feuilleton de Michel Zévaco : cet auteur de génie, sous l’influence de Hugo, avait inventé le roman de cape et d’épée républicain. Ses héros représentaient le peuple ; ils faisaient et défaisaient les empires, prédisaient dès le XIVe siècle la Révolution française.

    Sartre, Les Mots, 1964

    D’Artagnan, Rodolphe, Lagardère, Rocambole, Pardaillan, Rouletabille, tous ces personnages et tant d’autres qui ont marqué notre adolescence ou notre jeunesse et que nous regrettions de ne guère entrevoir dans les histoires de la littérature alors même qu’ils avaient enthousiasmé et conquis un très vaste public entre 1836 et 1914, les voici enfin réhabilités et replacés dans leur contexte par Lise Queffélec.

    Lise Queffélec, Le Roman-feuilleton français au XIXe siècle , coll. Que sais-je ? n° 2466

    Les sites que j’ai découvert et qui m’ont aidée dans ma réflexion :

    Origines des séries et épisodes
    Roman-feuilleton-encyclopédie Universalis
    Machines de roman-feuilleton -sur le site Persée
    La littérature au risque du numérique
    Le roman-feuilleton ou l’écriture mercenaire
    Le roman-feuilleton français au XIXe siècle

  • Aimeriez-vous lire un roman format feuilleton ?

    Aimeriez-vous lire un roman format feuilleton ?

    Réflexion

    C'est en forgeant qu'on devient forgeron » proverbe  
    C'est en écrivant qu'on devient écriveron » Raymond Queneau  
    C'est en lisant qu'on devient liseron. » Maurice Fombeure 
    C'est en sciant que Léonard de Vinci » calembour  

    Bouleversement de la pratique littéraire :  la cyberlittérature

    écrire un roman-feuilleton

    De tous les arts, la littérature est celui qui a rencontré l’informatique le plus tôt. Aujourd’hui la commercialisation du livre électronique prend la dimension d’une véritable révolution culturelle comparable à la diffusion de l’imprimerie, à la naissance du roman-feuilleton dans la presse à grand tirage du XIXe siècle ou, à l’invention du livre de poche.

     Le texte numérique est à l’origine d’un renouvellement radical des rapports auteur-texte-lecteur.

    L’exemple de cette nouvelle situation est la renaissance du feuilleton sur Internet. L’écrivain Jacques Jouet a été le premier en France à publier chaque jour sur le site des éditions P.O.L. un des 245 épisodes de son roman « la République de Mek-Ouyes », tandis que Martin Winckler propose à ses lecteurs de leur envoyer chaque jour un épisode de son roman-feuilleton « Légendes ». L’auteure Chris Simon a récemment publié en séries « Lacan et la boîte de mouchoirs » – Un autre exemple appartenant au passé : en Juillet 2000, Stephen King lançait un défi au monde de l’édition en proposant à ses lecteurs de télécharger sur son site son nouveau roman « The Plant » à raison d’un dollar par épisode. Son expérience a pris fin prématurément pour des raisons que je ne vais pas développer ici, c’est un auteur à succès, pas le meilleur pour illustrer le propos de mon article.

    Est-ce-que la reprise du roman-feuilleton qui a eu un énorme succès pour les auteurs au XIXe siècle ne serait pas une bonne méthode de publication numérique ?
    Ma question est celle-ci : Comment passer du mode invisible en mode visible ? Quelle est la meilleure stratégie à adopter pour être lu  ? Le roman-feuilleton est-il un format idéal de publication en ligne ? N’est-ce-pas l’opportunité de toucher plus facilement des lecteurs ?

    • Chapitres publiés de façon régulière
    • Petit prix
    • Liberté du lecteur de poursuivre ou non l’aventure
    Comment faire fonctionner un roman-feuilleton en ligne ? 
    Quel rythme ? Une publication par chapitre ?
    Cette méthode est-elle susceptible de plaire aux lecteurs ?

    Mes questions : (si vous avez le temps d’y répondre je vous en remercie d’avance)

    1. Quel rythme de parution ?
    2. Journalier – je trouve cela impossible, en tout cas pour moi.
    3. Hebdomadaire
    4. Mensuel
    5. Bi-mensuel
    6. Avec un nombre de pages chaque fois similaire ?
    7. Pas de gratuité – tout travail mérite salaire –
      Mais un prix accessible à toutes les bourses – lequel ?
    • 1€
    • 1,50€
    • 2€

    Si le lecteur qui a lu le Chapitre 1 à 1,50€ n’est pas satisfait il n’est pas obligé de continuer l’aventure et n’a pas dépensé une fortune pour satisfaire sa curiosité. Par contre s’il a aimé l’épisode, il a rendez-vous régulièrement avec l’histoire jusqu’à son point final.

    Dans la longue histoire de l’écrit, l’apparition de chaque nouveau support d’inscription du texte a généralement provoqué une modification des usages et des modes de lecture. La littérature a toujours été dépendante de ses supports et de ses moyens de production. La pierre gravée, le volumen, le codex, le livre imprimé, la machine à écrire, le traitement de texte ont tour à tour suscité des modes de lecture et d’écriture différents. Avec le support numérique, le changement est encore plus radical.

    liseuses

    Le livre électronique séduit les habitués du livre en préservant certaines de ses caractéristiques essentielles. À l’inconfort de la lecture sur écran qui impose au lecteur de rester mal assis devant son ordinateur de bureau, il substitue les avantages de la mobilité. Il tient dans la main, peut s’emporter partout et offre une assez bonne lisibilité.

    Pourquoi cette question : Aimeriez-vous lire un roman au format feuilleton ?

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    Je vais répondre par une question qui me turlupine, quel est le meilleur moyen de donner au lecteur l’envie de lire un auteur inconnu, de le découvrir, de découvrir ses écrits ?
    Les plateformes comme Amazon et Kobo/fnac (il y en a d’autres) ouvrent les portes de leur boutique aux auteurs indépendants, sans frais, sans investissement financier, mais elles sont géantes, ce sont de véritables labyrinthes où l’on se perd à peine y a-t-on posé les yeux. Sans compter qu’en France elles ont mauvaise réputation. Pourtant, ce sont les seules plateformes qui ne demandent pas d’investissement financier et qui donnent 70% du prix de vente du livre à l’auteur, et ce, de façon régulière, pas en fin d’année.

    Comment un lecteur peut-il trouver le livre d’un auteur inconnu des médias et du monde littéraire au milieu de plusieurs centaines de milliers d’autres livres ?

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    Écrire est un long travail, passionnant, mais réalisable ; la mise en page peut s’acquérir avec quelques tutos et un logiciel efficace, la mise en ligne sur les plateformes de vente de livres au format epub est de plus en plus facile. Mais rien, absolument rien,  ne peut garantir à un auteur que quelqu’un s’arrêtera devant la couverture de son livre — si belle soit-elle — pour le feuilleter et en lire ne serait-ce qu’un extrait.

    Le temps de l’écriture, de la mise en page, de l’impression, de la mise en ligne ou en vitrine, est définissable ; le temps de la rencontre avec les lecteurs
    est toujours une plongée dans l’inconnu.

    Pour un auteur célèbre, il y a des dizaines, voir des centaines d’auteurs anonymes sur le web. Quelle chance ont-ils de trouver leur public ?
    On a quelques exemples — où la réaction des lecteurs à un livre a été fulgurante, mais tout le monde sait que la règle générale est beaucoup moins exaltante ; la réaction arrive parfois plusieurs mois après la publication, voire plusieurs années ; il arrive parfois qu’elle ne se fasse  pas du tout. Un domaine impossible à maîtriser pour un auteur, quelque soit son talent…


    Certains penseront : Pourquoi ne pas soumettre — *Mettre dans un état de dépendance, proposer à l’examen, ramener à l’obéissance. Soumettre les rebelles — vos manuscrits à des éditeurs ? Pourquoi ne pas prendre le circuit classique de l’édition ?
    Je vous ai répondu en ce qui me concerne après l’ * ci-dessus.

    Attendre le retour d’un improbable « comité de lecture » au mieux six mois après l’envoi d’un manuscrit ? Manuscrit qui, s’il a la « chance » d’être publié, le sera sans véritable travail de relecture et de correction, « trop coûteux » – Une fois publié au format livre broché il restera 3 semaines sur les rayons des libraires avant le retour à la case départ, pour finir au pilon. Toute cette mise en scène pour gagner à peine 5% des ventes — s’il y en a — ce n’est pas non plus un conte de fée. D’autant que les journaux, les revues littéraires, les auteurs déjà édités ne cessent d’écrire chaque année des articles sur leur précarité grandissante.

    En se libérant des délais qu’impose le processus de fabrication des livres, la publication sur le web tend à abolir la distance entre l’auteur et ses lecteurs en rapprochant le temps de l’écriture de celui de sa lecture.

    prologue-liseuse
  • Il resta maître de son œuvre

    Il resta maître de son œuvre

    Parce qu’il a inventé le roman graphique
    Parce qu’il resta maître de son œuvre

    W.Eisner

    Je fais suivre l’article parce que j’apprécie ses dessins mais surtout parce que cet artiste maîtrisait l’ensemble de la chaîne de production avec sa propre maison d’édition. Passionnant.

    […] Cas rare dans la bande dessinée, Will Eisner garda la main sur son œuvre, dont il négocia très tôt les droits.
    « The Spirit lui appartenait, et est toujours géré par sa famille, indique Jean-Pierre Mercier. Dans les années 60, Eisner monta sa propre maison d’édition, Poorhouse Press, afin de maîtriser l’ensemble de la chaîne de production de ses livres. Plus tard, il publiera des ouvrages sur la théorie de la bande dessinée, faisant un pas de côté pour réfléchir à son médium. […]

    Will Eisner, l’inventeur du roman graphique exposé à Angoulême

    Will Eisner
  • Jusqu’à nouvel ordre !

    Jusqu’à nouvel ordre !

    Les écrivains font des châteaux en Espagne, les lecteurs y vivent, et les éditeurs touchent les loyers.
    — Maxime Gorki, (1868-1936)

    Et pas d’évolution ? Aparté suite à une lecture en ligne vantant le travail de l’éditeur : « Pour faire trembler Amazon qui ne s’en remettra pas, soutenez directement les auteurs ET (la maison d’édition) en commandant vos livres sur son site ».
    J’ai cherché sur le site de la maison d’édition la page consacrée à ces auteurs si bien soutenus (enfin une maison d’édition qui prend en compte le travail de l’auteur) et après avoir cliqué sans succès sur presque toute la navigation j’ai enfin trouvé tout en bas dans le pied de page à la catégorie contact une porte pour les auteurs  :
    Envoi de manuscrit : nous fermons la réception de manuscrits jusqu’à nouvel ordre.
    Libraires, bibliothécaires, journalistes : rendez-vous sur les pages Pro qui vous sont dédiées (charmant ce tapis rouge…)

    Pour les auteurs et leur travail, la porte était close ; même pas un petit « bonjour » sympa ; « une boisson chaude ? » ; « il avance comme vous voulez votre roman ?« . Comme soutien aux auteurs, « jusqu’à nouvel ordre », on se croirait presque sur les bancs de l’école, « Je ne veux plus entendre une mouche voler… »

    écrire


    Les écrivains, malgré de grandes prétentions à la liberté, sont souvent d’un conformisme affligeant. « Le crime capital pour un écrivain, c’est le conformisme » prétendit Rémy de Gourmont, dans Le livre des masques (1896).

    On serait tous à genoux devant ces faiseurs de livres à la chaîne ? Non, il y a eu de nombreux rebelles, des insoumis. Les frères Goncourt jugeaient « inacceptables » les suggestions de corrections de l’éditeur Didot. De même, Victor Hugo ou encore Charles Baudelaire écrivaient : « On ne retouche pas MES vers ». Selon Gustave Flaubert, un éditeur est un exploiteur qui « n’a pas le droit de vous apprécier ». Plus récemment, Marguerite Duras n’a jamais supporté la moindre remarque sur ses textes. Jean Cocteau répondit un jour à son éditeur Bernard Grasset qui l’agaçait en lui rappelant sans cesse l’importance de son rôle : « Vous devriez imiter les producteurs de cinéma, annoncer en gros titre « Un livre de Grasset » et en petits caractères « paroles de Cocteau », etc. Oui, il y a quelques bons éditeurs (du moins je veux le croire et ils peuvent être de bons conseils), mais il faut savoir sortir de ses gonds de temps en temps.

    Voilà, ça va mieux. Non mais… jusqu’à nouvel ordre !

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  • Semeur d’histoires

    Semeur d’histoires

    Des mots, des images, pour rêver…


    Il faut en semer un peu partout, des mots doux, des mots qui apaisent, des mots rassurants, des mots de soutien pour les enfants nés dans les endroits difficiles de notre monde. Ils pourront s’y accrocher, ne serait-ce qu’un instant, pour entrevoir une réalité différente, pour entendre le chant de la vie sous un ciel étoilé.
    Un Livre ! Illustré ou non, de poche ou relié, en format numérique ou papier, un livre de 20, 30, 40, 68, ou 520 pages, petit ou grand, à dévorer ou à savourer lentement, un livre qui vous appartient, que vous pouvez relire, partager, feuilleter, un compagnon de voyage, d’ici ou d’ailleurs… C’est aussi bien qu’un fast-food, un trajet en bateau-bus, un expresso en terrasse, un thé partagé avec des amis, une limonade fraîche, la visite d’une exposition ou une séance de cinéma…