L’étincelle de la flambée de Noël monte son étoile au ciel pour y puiser lumière et grâce et retombe au matin éclairer l’année.
Les étrennes
On raconte que les étrennes auraient pour origine quelques branches de verveine coupées dans un bois consacré à la déesse de la force « Stroenia« , et offertes, au premier jour d’une lointaine année, par ses sujets, au roi des Sabins Tatius qui, dés lors, instaura la coutume de s’échanger des petits cadeaux de toutes espèces les stroenae : « étrennes ». Les Gaulois, séduits par l’usage, y ajoutèrent le gui et les fêtes : Gui l’en neu, guienlai, guilanlai, guillandou, éguinané, angouilanou, au gui l’an neuf et toutes ses variantes.
Au Guénel l’an neuf !
Retrouvons le plaisir d’écrire, même par courriel, envoyons nos vœux bienveillants, sur lesquels flottent quelques vestiges des parfums du gui et de la magie…
Rire souvent et sans restriction ; s’attirer le respect des gens intelligents et l’affection des enfants ; tirer profit des critiques de bonne foi et supporter les trahisons des amis supposés ; apprécier la beauté ; voir chez les autres ce qu’ils ont de meilleur ; laisser derrière soi quelque chose de bon, un enfant en bonne santé, un coin de jardin ou une société en progrès ; savoir qu’un être au moins respire mieux parce que vous êtes passé en ce monde ; voilà ce que j’appelle réussir sa vie.
— Ralph Waldo Emerson (1803-1882)
Le passage d’une année à l’autre…
Que puis-je souhaiter pour cette nouvelle année ? J’ai envie d’arrêter de regarder ce qui enlaidi la vie ; d’arrêter d’écouter ceux qui condamnent la vie ; j’ai envie de me relier aux arbres, aux fleurs, aux animaux, de dire oui au jour qui vient, au temps qui passe, de me dire oui à moi-même. Pas de résolutions intenables non plus, mais plutôt…
Qu’est-ce que je fais déjà qui est satisfaisant ? Qu’est-ce que je fais qui est insatisfaisant ? Comment je peux réorienter mon gouvernail pour aller vers le mieux, pour prendre une direction qui irait vers le mieux…
Un extrait du livre de Stéphane Floccari, « Nietzsche et le nouvel an » (Encre marine) – Les Belles Lettres.
« On change de jour tous les jours, rappelle avec profondeur le philosophe Nicolas Grimaldi. Mais, une fois par an, un jour advient comme autre chose qu’un jour de plus. Ce jour singulier où l’année vire, comme le temps change ou la chance tourne, celui où le calendrier scande un avant et un après, nous l’appelons, sans trop savoir ce que nous en attendons, le Jour de l’an. Nous le fêtons comme la césure décisive qui ouvre un temps à soi, qui est aussi commun à tous.
La veille de ce jour-là, demain, c’est l’an prochain. Le temps d’un jour, l’an qui vient cesse d’être lointain. L’existence se réinvente et se projette hors d’elle-même à l’horizon de ce jour singulier autrement que tous les autres jours de l’année. La vie sociale se suspend à l’axe de cette promesse de renouveau.
Chacun y accroche pêle-mêle son pesant d’espérances, de craintes tues, et ses aspirations les plus intimes. Mais comme ces coquillages vides qu’on croit un instant habités par le son de la mer, chaque passage à la nouvelle année s’accompagne d’un bruit de fond auquel les hommes redeviennent vite, étrangement vite, sourds et étrangers. En tendant l’oreille, chacun peut en percevoir, aux heures où janvier chasse décembre, la rumeur inquiète au fond de lui-même. Qu’ai-je fait des années qu’il m’a été donné de vivre, et particulièrement de la précédente ? Serais-je prêt à les revivre toutes de la même façon ? Que puis-je désirer d’autre, de réellement personnel, pour celle qui vient, encore ouverte à tous les possibles et qui n’est pour l’heure associée à rien de précis, ni d’irréversible ? De quel souhait, de quel vœu, si l’on en suspend provisoirement tous les cadres traditionnels d’appréhension, la nouvelle année peut-elle pour moi devenir l’occasion et la promesse ? »
Il y a quelques jours, j’ai écouté une interview de Brigitte Giraud, l’autrice qui a écrit « Vivre vite » prix Goncourt 2022, elle parlait de son travail d’éditrice, à l’époque où elle était chez stock.
Ce qu’elle dit sur le rapport à la lecture me semble profondément juste. J’ai lu quelque chose d’assez similaire de J.M.G Le Clézio, qui était dans sa jeunesse lecteur dans une maison d’édition.
« C’est une expérience unique et magnifique, lire sur manuscrit, c’est à dire un texte qui n’est pas contextualisé, qui n’a pas le poids de la publication et notamment le nom de la maison d’édition chez qui il est publié. On le lit comme quelque chose d’absolument vierge, ça m’a appris à lire autrement et à faire une véritable expérience du rapport à quelque chose de l’ordre de la nudité ou de la crudité. »
Est-ce que les textes se sentiraient beaucoup mieux sans maison d’édition ?
« C’est une question qui est essentielle à mon avis. J’ai souvent pensé à cette chose là, de me dire comment les lecteurs, ou plutôt les professionnels que sont les libraires, mais que sont aussi les journalistes, aborderaient des textes sous une couverture blanche. C’est à dire qui n’est pas déjà désigné par un type de catalogue et donc de filiation proposée par une maison d’édition. Mais j’irai encore plus loin que cela. L’expérience la plus intense et la plus radicale de lecture, c’est celle aussi d’un texte qui ne serait pas marqué par le nom de son auteur, dont on ne saurait pas si c’est un premier roman ou si c’est le Xe roman d’un auteur qui est déjà très remarqué ou par la presse ou par les libraires ou par les lecteurs. Et c’est vrai que l’expérience de lecture est radicalement différente. »
Ô Été, Ô juin, mois de Junon, déesse de la lumière céleste, divinité lunaire et des ventres ronds, qui veille sur les mariages et les enfantements. Jeune aïeule des vieilles mères, des fées ventrières et fées marraines… Elle protège les amours, les amours d’été, les amours toujours, qui toujours ont été.
Juin, mois de la jeunesse, des muses, des vertes prairies, des fenaisons, des grands feux de la Saint-Jean du solstice d’été. Juin à la flore épanouie, aux eaux vives, à la faune en amour, et ces soirées douces et parfumées et longue… du plus long jour… parvenu au sommet de sa course rayonnante.
Juin, une invitation à se fondre dans le moindre brin d’herbe.
Juin, quel bonheur aujourd’hui nous donneras-tu ? Sur l’onde courent tes vents légers…
Un 2e été ? la chaleur (quand ce n’est pas la canicule) et les jours ensoleillés ont commencé en avril cette année voire mi-mars
C’est aujourd’hui l’anniversaire d’un grand poète irlandais : William Butler Yeats (1865-1939). Un peu en référence à l’île où je vis, à la beauté des lacs de Savoie que je viens de quitter (petit périple dans la vallée des Alpes), le poème lyrique « L’île au lac d’Innisfree » est une invitation à une vie bucolique, loin du tumulte des cités… Le poète avait nourri le désir de vivre – à l’exemple de Thoreau dans Walden, suite à une lecture de son père – à Innisfree sur une petite île du Lough Gill.
L’ÎLE AU LAC D’INNISFREE
Allons, je vais partir, partir pour Innisfree, Et y bâtir une petite hutte d’argile et de rameaux tressés : J’aurai là-bas neuf rangs de fèves , une ruche pour l’abeille à miel, Je vivrai seul dans la clairière embourdonnée d’abeilles.
Là-bas j’aurai un peu de paix, car la paix tombe doucement Des voiles du matin sur le champ du grillon ; Là-bas minuit n’est que miroitement et midi y rougeoie d’une pourpre lueur, Là-bas le soir est plein des ailes des linottes.
Allons je vais partir, car nuit et jour j’entends L’eau du lac clapoter en murmures légers sur la rive ; Arrêté sur la route ou sur les pavés gris, Je l’entends dans le tréfonds du cœur.
(extrait de « La Rose et autres poèmes« )
— ACKER BILK - ÁRIA - Michał Urbaniak
Tu me dis de prendre la vie simplement, comme l’herbe pousse sur la levée…
Au bas des jardins de saules
Au bas des jardins de saules je t’ai rencontrée, mon amour. Tu passais les jardins de saules d’un pied qui est comme neige Tu me dis de prendre l’amour simplement ainsi que poussent les feuilles, Mais moi j’étais jeune et fou et n’ai pas voulu comprendre.
Dans un champ près de la rivière nous nous sommes tenus, mon amour, Et sur mon épaule penchée tu posas la main qui est comme neige. Tu me dis de prendre la vie simplement, comme l’herbe pousse sur la levée, Mais moi j’étais jeune et fou et depuis lors je te pleure.
Avant de savourer des températures plus fraîches et sûrement quelques douches sous une pluie battante, ici en automne il y a de nombreuses précipitations — je vis sur une île et pour me rendre à l’embarcadère, je dois donner quelques coups de pédales — je partage avec vous un joli souvenir d’été.
Fin juillet j’ai visité la belle demeure berrichonne de George Sand à Nohant où sont conservés le mobilier et les objets au milieu desquels elle vécut… J’ai passé un moment exquis à écouter la guide raconter l’histoire de sa vie au milieu du personnel et des invités du domaine, Balzac, Chopin, Delacroix, Flaubert, Liszt, etc. Le jardin est un enchantement, on y flâne, on s’y ressource, on s’en inspire, on a eu beaucoup de mal à le quitter… Il est composé de plusieurs parties distinctes, dont un petit bois, espace ombragé de promenade, et d’autres parties exposées au soleil, le potager, la roseraie, le jardin des poules, le verger… George Sand était passionnée de botanique.
[…] je préfère aux jardins arrangés et soignés, ceux où le sol, riche par lui-même de plantes locales, permet le complet abandon de certaines parties.
J’ai fait cette escapade littéraire pour me rapprocher de Louison — tome I du roman « Les souvenirs oubliés sont-ils perdus à jamais » — elle y parle brièvement de sa lecture de « Histoire de ma Vie » de George Sand, elle y note même un extrait dans son journal (partie 1). Pour me rapprocher aussi de son amie Susanne et de sa fille Anna, toutes deux passionnées d’expéditions littéraires. Une prochaine fois j’irais peut-être visiter le passage Pommeraye à Nantes, où Louison a son atelier — des lecteurs ont déjà fait le voyage — ou la plantation de café des Semprun à la Jamaïque, qui sait ? Un clin d’œil au rêve des enfants dans la partie 5, chapitre 2.
Le tome II avance à grandes lignes, mais il faut encore des relectures et des corrections, je pense que ce sera un diptyque, j’aimerais… En attendant, cette courte vidéo, pour illustrer un propos de George Sand à la belle saison automnale…
Si j’ai le temps je partagerai des extraits de sa prose botanique que j’ai notés ou enregistrés.