Une aube de douceur s'éveille sur la lande : Le printemps de Bretagne a fleuri les talus. Les cloches de Ker-Is l'ont dit jusqu'en Islande Aux pâles « En-Allés » qui ne reviendront plus.

Nous aussi qui vivons et qui mourrons loin d'elle, Loin de la douce fée aux cheveux de genêt, Que notre cœur au moins lui demeure fidèle : Renaissons avec elle à l'heure où tout renaît.
Ô printemps de Bretagne, enchantement du monde ! Sourire virginal de la terre et des eaux ! C'est comme un miel épars dans la lumière blonde Viviane éveillée a repris ses fuseaux.
File, file l'argent des aubes aprilines ! File pour les landiers ta quenouille d'or fin ! De tes rubis. Charmeuse, habille les collines ; Ne fais qu'une émeraude avec la mer sans fin.

C’est assez qu’un reflet pris à tes doigts de flamme,
Une lueur ravie à ton ciel enchanté,
Descende jusqu’à nous pour rattacher notre âme
A l’âme du pays qu’a fleuri ta beauté !
— Charles Le Goffic (1863-1932), Le bois dormant (1900)