J’aime Noël, les lumières qui clignotent autour du sapin, les boules rouges et vertes, l’odeur du pain d’épice, la douceur de la bûche au fond du palais, les enfants qui s’amusent tard et rient en ouvrant leurs cadeaux, la chaleur de se retrouver tous ensemble après de longs mois d’absence parfois. J’aime les petits santons dans les crèches, la ville illuminée et resplendissante sous la neige (quand on a la chance d’en avoir). L’hiver dans ce qu’il a de plus magique, de plus majestueux.
Pourtant je me rends compte que ce n’est pas vraiment cela le message de cette nuit et que l’on passe à côté de quelque chose de plus profond qu’on a oublié dans le brillant et l’opulence. Chaque année j’ai envie de relire les contes d’Andersen : « Le sapin » et « La petite marchande d’allumettes » ; les Contes de Dickens : « Un chant de Noël ». J’ai envie que le monde se réveille et efface toutes les souffrances et les inégalités, comme par magie, puisqu’on peut tout demander au père Noël. Pourtant, le jour qui paraît le lendemain, entre les brindilles du sapin qui commence à déchanter, n’a pas changé le déséquilibre du monde, il n’a pas ôté son vacarme et son indifférence. Le prince de l’amour ne s’intéresse-t-il plus à nous ?
[…] Etre né sur la paille, avoir échappé à Hérode et finir sur une croix, tout ça pour que le 24 décembre, les foules hystériques se battent devant les vitrines, obsédées par cette question : faudra-t-il ouvrir les magasins le dimanche au cas où l’on n’aurait pas le temps de remplir les hottes de Noël, ras-la-gueule […]
[…] Avoir fait de l’anniversaire de la naissance de l’homme qui nous a enjoint de nous débarrasser de nos biens et de partir sur les routes à la recherche de l’amour, une fête où l’on s’ensevelit les uns les autres sous un tombereau de cadeaux dans la chaleur du foyer familial, c’est l’un des plus habiles détournements de message de l’histoire de l’Occident. […]
« Géographie de l’instant » – Sylvain Tesson
N’oubliez pas « La petite fille aux allumettes » de H. Ch. Andersen

